Seine-et-Marne. Blessée avec le GIGN, elle décroche l’or mondial en aviron !
Originaire de Courchamp, près de Provins, Margot Boulet est devenue championne du monde d’aviron indoor handisport le 23 février. L’athlète, ancienne gendarme, vise les JO 2021.
Par Maxime Berthelot
Publié le 9 Mar 21 à 20:32
C’est un drôle de plan d’eau, où même des canards n’auraient pas osé faire trempette. Et pour cause. D’eau, il n’y a point ! Installée sur la terrasse de ses parents, à Courchamp, Margot Boulet vient de participer aux championnats du monde d’aviron 2021 « indoor », comprenez « en intérieur » et surtout à distance, en raison de la pandémie de Covid-19.
Pas de bateau, donc, mais un rameur, une connexion Internet et un portable pour la retransmission officielle de l’épreuve. Des conditions particulières que l’athlète provinoise handisport a su apprivoiser pour décrocher sa première médaille d’or mondiale sur 2 000 m (7’31 »6), et un nouveau record de France !
« C’était compliqué de se mettre en mode concurrence, notamment dans les minutes qui précèdent la course. Il n’y a pas les regards entre les concurrents et cette atmosphère qui transcende. En revanche, au niveau de l’échauffement, c’était plus pratique et moins fatigant car il n’y avait pas besoin de se déplacer. Je suis contente de ma performance. Ce n’était pas prévu que je participe, mais j’ai fait le forcing pour pouvoir rester en tension. J’ai besoin d’avoir un objectif intermédiaire au moins une fois par mois ! (rires) »Margot Boulet (Cercle aviron nogentais)Avironneuse provinoise handisport, championne du monde 2021 en individuel sur 2 000 m
Objectif Jeux olympiques
Après un titre de championne du monde para-aviron en individuel sur 500 m, et une médaille de bronze aux championnats d’Europe 2020 de Poznan (Pologne) en quatre barré mixte pour sa première compétition internationale en bateau, la voilà donc championne du monde en individuel.
Avec un objectif qu’elle n’aurait même pas imaginé il y a encore trois ans : participer avec l’équipe de France aux Jeux paralympiques de Tokyo (Japon), prévus du 24 août au 5 septembre 2021. Car cette boulimique de compétition est avant tout une nageuse qui a failli ne plus jamais faire de sport de sa vie.
Sept fois sur le billard
Née à Provins, où elle a réalisé toute sa scolarité, Margot Boulet est licenciée au club de natation de la cité médiévale depuis ses 6 ans, nonobstant une parenthèse du côté de l’aqua-club Pontault-Roissy, entre 2006 et 2012.
Cette année-là, elle intègre la gendarmerie nationale et le régiment de cavalerie de la Garde républicaine, puis passe les tests pour rejoindre le Groupe d’intervention de la gendarmerie nationale (GIGN) en 2016 :
« Je les ai réussis, mais en mars 2017, durant l’année de formation, je me suis sérieusement blessée lors d’un stage de parachutisme. Résultat : une fracture du dos et de la cheville gauche. »Margot Boulet (Cercle aviron nogentais)Avironneuse handisport provinoise, championne du monde 2021 en individuel sur 2 000 m
Sept opérations, la pose d’une prothèse de cheville et une arthrodèse lombaire plus tard, elle doit se résoudre à quitter le GIGN, puis la gendarmerie en 2018, incapable de courir.
« En réadaptation, je me suis rapprochée de mes parents, car j’étais en fauteuil, puis en béquilles, raconte-t-elle. Quand j’ai pu, j’ai ensuite repris la natation à Provins avec les valides, en compétition au niveau régional. Mon père et ma mère faisant partie du Cercle aviron nogentais, le club d’aviron de Nogent-sur-Seine (Aube). J’ai aussi pris une licence pour les aider à encadrer les jeunes. »
« L’Armée ne m’a jamais abandonnée »
Et puis un jour, un cadre de la fédération française discute avec ses parents. On est alors fin 2019. Le quatre barré mixte français est qualifié pour les Jeux olympiques de Tokyo, mais recherche une rameuse après le départ d’une athlète. Une occasion rêvée : « Bien sûr que ça m’a intéressée, mais je n’étais jamais montée dans un bateau !, se souvient la Provinoise. Il a donc fallu que j’apprenne. »
En décembre 2019, elle part donc en stage à Vaires-sur-Marne avec l’équipe de France paralympique, le début d’une nouvelle aventure. D’entrée, elle fait forte impression :
« J’ai fait un test sur 2 000 m, et dès mon premier essai, j’ai terminé à seulement deux secondes du record de France. Donc du côté physique, on peut dire que ça allait ! (rires) Je n’avais plus qu’à apprendre à ramer ! »Margot Boulet (Cercle aviron nogentais)Avironneuse handisport provinoise, championne du monde 2021 en individuel sur 2 000 m
Accompagnée par l’Armée depuis son accident, elle passe alors « sportive de haut niveau de la Défense » en novembre 2020, une première en France : « Ce statut n’existait pas encore pour les athlètes handicapés, rappelle-t-elle. Aujourd’hui, l’Armée me rémunère, je vis de ce métier, c’est une fierté. La Défense ne m’a jamais abandonnée. »
À 30 ans, Margot Boulet ne manque pas d’ambition. Le report d’un an des JO lui a permis de progresser. « Avant les Jeux, il y aura les championnats d’Europe 2021 en Italie, en avril », conclut-elle, jamais avare de challenges. Une des rares compétitions qu’elle n’a pas encore remportée !