Protection fonctionnelle des policiers et gendarmes : une mission est menée par le ministère de la Réforme de l’État (Alain Vidalies)
«Des modifications [législatives] sont souhaitables » en matière de protection fonctionnelle des policiers et gendarmes. C’est ce qu’indique Alain Vidalies, ministre délégué chargé des Relations avec le Parlement, jeudi 6 décembre 2012. Il intervenait à l’Assemblée nationale dans le cadre de la discussion, en séance publique, d’une proposition de loi – rejetée par les députés – relative aux « conditions d’usage légal de la force armée par les représentants de l’ordre dans l’exercice de leur mission et renforçant la protection fonctionnelle des policiers et des gendarmes ». Ces évolutions législatives, poursuit le ministre, « interviendront lorsque seront connues, dans les semaines qui viennent, les conclusions de la mission interministérielle menée par le ministère de la Réforme de l’État, de la Décentralisation et de la Fonction publique ».
La mission s’intéresse, indique Alain Vidalies, à « l’extension de la notion d’ayant droit aux concubins et partenaires de Pacs » et à « l’extension du bénéfice de la protection fonctionnelle des agents victimes d’infractions involontaires donnant lieu à des poursuites pénales », comme le préconisait la mission pilotée par le conseiller d’État Mattias Guyomar. Cette mission a proposé, en juillet 2012, plusieurs mesures en faveur de la protection juridique et fonctionnelle des policiers et gendarmes faisant usage de leur arme dans le cadre de leurs fonctions (AEF Sécurité globale n°6652). « Ces éléments de réforme seront pris en compte dans le chantier de la modernisation et de l’amélioration du statut des agents de l’État », annonce Alain Vidalies.
RÉGIME D’UTILISATION DES ARMES
La proposition de loi de l’opposition avait pour objectif, selon l’un de ses auteurs et rapporteur de la proposition, Guillaume Larrivé (UMP, Yonne), « la traduction législative » de l’ « important travail de réflexion » conduit par Matthias Guyomar. Elle proposait également « un alignement du régime juridique de l’emploi des armes par les policiers sur celui des gendarmes », indique le député. En effet, « dans la police nationale, les conditions d’emploi des armes à feu sont régies par le seul code pénal, c’est-à-dire par le droit commun […]. Un policier n’est donc autorisé à faire feu qu’en réponse à une agression de même nature, dans le strict cadre de la légitime défense », résume Guillaume. Les gendarmes, quant à eux, peuvent « faire feu après des sommations verbales, dans des conditions limitatives précisément énoncées par la loi. Du reste, elles sont fréquemment appliquées par les gendarmes ». « Cette différence de régime constitue pour les policiers une situation d’insécurité juridique qui les amène, au péril de leur vie, à hésiter à se défendre en cas d’agression violente, par crainte de poursuites administratives ou judiciaires. »
« Aligner un régime civil sur un régime militaire ne me semble pas, à ce stade, la bonne méthode pour sécuriser les policiers et gendarmes dans l’exercice de leur mission, indique Alain Vidalies. Ce fut également le sens des conclusions de la commission Guyomar. Je rappelle d’ailleurs qu’il n’existe pas de véritable consensus au sein des organisations professionnelles sur ce sujet. » Selon le ministre, « la différence historique des régimes juridiques trouve son origine dans la différence des situations auxquelles sont confrontés les policiers et les gendarmes. Ces derniers, en zone rurale, ne sont pas dans la même situation que des policiers en zone urbaine, où chacun peut comprendre que l’emploi des armes à feu soit régulé du fait de la densité de population. Cette différence a toujours sa pertinence si vous songez par exemple aux missions complexes menées par la gendarmerie nationale en Guyane dans le cadre de l’opération Harpie, en pleine forêt amazonienne ».
De plus, fait valoir Alain Vidalies, « l’alignement envisagé, fondé sur une comparaison littérale des textes applicables, fait fi de l’importante et décisive jurisprudence, tant nationale qu’européenne, qui est venue éclairer l’application de ces dispositions, notamment sur l’exigence de l’état de nécessité et de proportionnalité dans l’usage des armes à feu […]. Les dispositions spécifiques aux gendarmes sont ainsi, aujourd’hui, appréciées par les juridictions à l’aune des standards européens qui s’appliquent à l’ensemble des forces de sécurité intérieure de l’Europe. »
Source : Dépêche n° 7847 Paris, vendredi 7 décembre 2012, 14:58:59