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Le - Le Sénat passe en revue les investissements dédiés à la cybercriminalité

Le Sénat passe en revue les investissements dédiés à la cybercriminalité

Dans son récent rapport consacré aux investissements réalisés dans le cadre des activités de la police et de la gendarmerie (PDF), le sénateur écologiste Jean-Vincent Placé revient tout particulièrement sur les efforts de engagés en matière de cybercriminalité ou de « commissariat électronique ». Explications.

Le Sénat passe en revue les investissements dédiés à la cybercriminalité« Au cours de la période passée, le mouvement de modernisation de la police et de la gendarmerie a été mené à un rythme soutenu » assure le rapport sénatorial mis en ligne aujourd’hui sur le site Internet de l’institution. Effectué par Jean-Vincent Placé au nom de la commission des Finances de la Haute assemblée, ce document salue notamment le « véritable saut technologique » réalisé ces dernières années par les forces de l’ordre, que ce soit la police ou la gendarmerie.

L’intéressé insiste notamment sur la vidéosurveillance (voir notre article), mais également sur ce qu’il appelle le commissariat électronique. Derrière cette expression, se cachent en réalité trois dispositifs : la pré-plainte en ligne, généralisée sur l’ensemble du territoire depuis le début de l’année, la plateforme de signalement Pharos, ainsi que la plateforme téléphonique « Info-escroqueries ».

« Le commissariat électronique »

Le rapport retient que le dispositif de pré-plainte en ligne, qui permet à la victime d’une atteinte aux biens (vol, vandalisme, escroquerie, abus de confiance,…) de remplir une télédéclaration avant d’obtenir un rendez-vous au poste, « contribue à l’amélioration des conditions d’accueil du public en supprimant les délais d’attente auxquels sont confrontées les victimes, tout en réduisant le temps nécessaire à l’enregistrement de la plainte par les personnels de police ou de gendarmerie ». L’on apprend surtout que l’application correspondante, développée en interne, génère « un coût de 40 000 euros par an pour son hébergement auprès d’un opérateur extérieur ».

S’agissant de Pharos, la plateforme gouvernementale destinée à recevoir les signalements des internautes et des intermédiaires à propos de contenus diffusés en ligne mais contraires aux lois et règlements, le rapport Placé affirme qu’elle est « gérée par dix fonctionnaires de police et militaires de la gendarmerie » (même si l’OCLCTIC nous confiait il y a peu que vingt agents s’occupaient de cette plateforme).

L’élu écologiste rappelle ensuite que 119 788 signalements ont été effectués sur Pharos au titre de l’année 2012 (soir plusieurs dizaines par jour et par personne). Un nombre qui devrait d’ailleurs très vraisemblablement être amené à augmenter au regard des évolutions à venir du dispositif. En effet, un arrêté pris au début du mois vise à impliquer davantage les intermédiaires techniques face aux dénonciations effectuées par les particuliers sur Pharos, de la même manière que le projet de loi sur l’égalité entre femmes et hommes. FAI et hébergeurs seront ainsi tenus d’agir activement à l’encontre des discours haineux, sexistes, homophobes et handiphobes qui leur auront été signalés.

Le coût de maintenance de Pharos s’élève à 50 000 euros selon le rapport sénatorial. L’on apprend également que la mise en place de Pharos « remonte au 1er janvier 2009 pour un investissement initial de 100 000 euros ». De plus, l’investissement consacré par l’OCLCTIC vis-à-vis de Pharos sur la période allant de 2007 à 2012 s’élève à 90 000 euros.

À propos d’« Info-escroqueries », la plateforme téléphonique permettant au public de se renseigner sur les escroqueries (commises sur Internet ou non), ou bien d’en signaler une, le rapporteur se contente d’affirmer que celle-ci a reçu 42 363 appels en 2012.

Rappelons au sujet du « commissariat électronique » que Manuel Valls a annoncé le mois dernier qu’un « groupe de réflexion prospective » allait se pencher sur la façon dont les autorités pourraient moderniser davantage les relations entre les forces de l’ordre et la population. Le ministre de l’Intérieur a d’ailleurs explicitement fait comprendre que la police « 3.0 » passerait par davantage d’échanges au travers des réseaux sociaux.

Des investissements pour lutter contre la cybercriminalité

Le rapport du sénateur écologiste insiste d’autre part sur la manière dont policiers et gendarmes ont dû faire face à « l’émergence de nouvelles formes de criminalité, notamment sur Internet ». Il s’avère d’ailleurs que police judiciaire a consommé, entre 2007 et 2012, 1,3 million d’euros de crédits d’investissement à la lutte contre la cybercriminalité. Les différentes composantes du dispositif actuel de lutte contre la cybercriminalité sont au passage présentées par le parlementaire :

  • « au niveau ministériel : la composante mixte « police-gendarmerie » participe à la plateforme nationale des signalements Internet (PHAROS), implantée au sein de l’office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l’information et de la communication (OCLCTIC) ;
  • au niveau central : une composante d’expertise (avec 14 militaires du département informatique de l’IRCGN) se combine à une composante d’investigations et de coordination (reposant sur 23 militaires de la division de lutte contre la cybercriminalité du service technique de recherches judiciaires et de documentation, abritant le centre national d’analyse des images de pédopornographie) ;
  • au niveau local : 200 enquêteurs (départementaux et régionaux) en nouvelles technologies numériques (NTECH) et 400 correspondants locaux (C-NTECH). »

De la même manière, il est expliqué que l’équipement des enquêteurs en matière de cybercriminalité (ICC) se décline sur trois niveaux :

« Le premier niveau concerne les « mallettes ICC ». Ces mallettes contiennent le matériel minimum indispensable permettant aux enquêteurs de mener à bien leurs investigations. Ce matériel individuel et transportable est essentiellement composé d’un ordinateur portable puissant, de bloqueurs en écriture permettant de préserver l’intégrité des pièces à conviction numériques analysées, de progiciels d’investigation destinés à rechercher et à récupérer des données effacées ou non sur des supports numériques, ainsi que d’un outillage spécifique destiné au démontage des différents matériels informatiques (ordinateurs fixes, portables, tablettes tactiles…).

Le second niveau concerne les stations d’analyse fixes. Il s’agit là d’un matériel mutualisé au sein d’un service spécialisé. Il vise les mêmes objectifs que les mallettes ICC mais avec une puissance plus importante permettant de traiter davantage de données dans le même laps de temps, en permettant notamment l’usage de progiciels plus puissants.

Le troisième niveau concerne les serveurs SARE (serveur d’analyse et de recherche électronique). Ce niveau d’équipement ne concerne toutefois que de très rares services spécialisés dans l’investigation cybercriminelle et ayant à traiter dans le temps d’une garde à vue de très importants volumes de données se comptant en téraoctets. Il permet notamment à plusieurs enquêteurs de travailler simultanément sur le même support numérique. »

Le rapport affirme que 2,1 millions d’euros ont été investis en 2011 afin d’acheter 104 mallettes ICC, 41 stations d’analyse fixes et 5 SARE. En 2012, ce sont 60 mallettes ICC et 7 stations d’analyse qui ont été achetées pour un coût de 618 000 euros. « Ce moindre investissement s’explique par le nombre plus restreint d’ICC qu’il restait à équiper » est-il indiqué. Rappelons ici qu’un groupe de travail interministériel sur la cybercriminalité doit rendre ses conclusions le mois prochain.

Des pistes technologiques à concilier avec le respect de la vie privée

Alors que la polémique relative aux activités de surveillance des États bat de nouveau son plein depuis quelques jours, le rapport de Jean-Vincent Placé insiste le fait qu’il convient de « concilier la diffusion du progrès technologique au sein des forces de sécurité intérieure avec l’impérieuse nécessité de garantir les libertés publiques et le droit à la protection de la vie privée ». Ceci étant dit, et après souligné qu’il convenait « d’avoir à l’esprit le caractère potentiellement intrusif de certaines [technologies] », l’élu écologiste revient sur les pistes suivies par les forces de l’ordre.

Cyberenquête – « Les technologies de fouille, de reconstruction des réseaux et de traçabilité sont essentielles pour parvenir à identifier les sources réelles des rumeurs, à suivre les connexions sur des sites surveillés et à identifier les sources de renseignement (…). Si les enquêtes criminelles comprennent depuis fort longtemps des enquêtes de voisinage, elles comportent aujourd’hui systématiquement un volet de voisinage téléphonique et de vidéosurveillance. Demain, ce sera le cybervoisinage qui fera l’objet d’une analyse systématique créant le concept de « cyberenquête ». »

Fichiers de police – « Les « fichiers de police » jouent un rôle fondamental dans l’exercice des métiers de la sécurité. Ils fonctionnent actuellement « en silo » pour éviter les recoupements qui pourraient s’avérer attentatoires aux libertés individuelles. Les évolutions technologiques à venir peuvent permettre de les rendre encore plus efficients grâce à de nouvelles architectures logicielles. Ces architectures permettront à la fois de les décloisonner grâce à des techniques d’anonymisation et de recouper les données grâce aux algorithmes de rapprochement criminel. »

Électronique miniaturisée – « D’une manière générale, grâce à des composants plus puissants et moins consommateurs d’énergie, l’électronique miniaturisée trouvera de nombreuses applications dans le domaine des capteurs et de la robotique (terrestre ou aérienne). Elle apportera ainsi une valeur ajoutée certaine aux services de renseignement et d’enquête (tracking, capteur infra-rouge, caméra mega-pixels, navigation sans GPS…) en particulier dans les domaines de l’intervention et de la surveillance. »

Drones – « Le contexte budgétaire contraint ainsi que la règlementation aérienne en vigueur ne permettent pas, pour le moment, d’envisager l’acquisition et l’emploi de mini-drones. Ces matériels pourraient cependant à terme être utilisés dans les actions d’ordre public, de recherche de personnes disparues, de surveillance de sites sensibles (centrales nucléaires…), de renseignement (dans le cas d’un individu retranché, par exemple), de prélèvements en zone contaminée ou encore de photographie de scène de crime étendue (crash aérien…). Un encadrement strict de l’emploi de ces engins sera néanmoins nécessaire. »

Vidéosurveillance – « Le coût humain de la surveillance par les opérateurs au moyen de systèmes vidéo étant significatif, il conduira probablement au développement d’une vidéosurveillance dite « intelligente ». Grâce aux technologies de traitement d’images en temps réel intégrées dans des caméras devenues de véritables rétines artificielles, les détections d’anomalies ou de phénomènes inhabituels seront automatiques. Elles offriront une réelle capacité (automatique et en temps réel) d’alerte, sans avoir recours à de nombreux opérateurs dont la fatigue oculaire et le degré d’attention constituent finalement la limite opérationnelle. »

Source : PCIMPACT www.pcinpact.com

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