La cyberdélinquance en forte hausse en Pyrénées-Atlantiques
Par Batiste KolencElle est relativement nouvelle, difficile à quantifier, les statisticiens ont encore du mal à la catégoriser. Selon le colonel William Vaquette, commandant le groupement départemental de gendarmerie, la cyberdélinquance est pourtant incontestablement « en forte hausse depuis cinq ans », dans le département comme partout en France.
Certes, les statistiques officielles ne différencient pas encore la cyberdélinquance de la délinquance traditionnelle (ce qui devrait changer cette année). Mais en Pyrénées-Atlantiques, la gendarmerie identifie malgré tout plusieurs catégories de crimes et délits qui sont de plus en plus commis via internet.
« Pour les escroqueries et les abus de confiances, sur la zone gendarmerie, un peu moins de la moitié des faits constatés l’ont été via internet », illustre le colonel Vaquette, qui préfère rester prudent, en l’absence de statistiques précises.
Les grosses sommes des faux ordres de virement
Cas typiques : la fausse annonce sur un site comme Leboncoin.fr, le spam à l’histoire rocambolesque demandant d’avancer de l’argent, ou le piratage du compte Facebook d’un ami qui vous demande subitement de lui fournir une aide financière.
Mais certaines escroqueries peuvent faire beaucoup plus mal au portefeuille. On se souvient d’Habitelem, à Pau, qui a failli être victime d’une arnaque au faux ordre de virement. Les escrocs avaient récolté un maximum d’informations sur l’entreprise, puis usurpé l’identité d’un conseiller du patron, dans l’espoir de se faire virer en urgence 900 000 euros. L’arnaque avait échoué cette fois. Mais à la même époque, une entreprise agroalimentaire des Landes travaillant pour Géant Vert, et détenue à 50 % par le béarnais Euralis, avait subi un pillage de 17 millions d’euros avec la même technique. Des faits qui datent de 2013, mais la gendarmerie assure que d’autres se sont produits depuis, notamment cette année, sans donner de détails.
Les escroqueries et abus de confiance sur internet, catégorie de cyber-délinquance la plus importante dans le département, ne sont pas les seuls à être particulièrement constatés sur le Net par la gendarmerie. Les atteintes à la dignité et à la personnalité (diffamations, insultes, rumeurs) par internet se sont beaucoup développées, comme les atteintes sexuelles (qui incluent la pédophilie), les chantages et menaces pour extorsion de fonds.
Des PME victimes d’un rançonnement automatisé
Plusieurs entreprises du département ont aussi été rançonnées. Les pirates lancent des attaques automatiques un peu au hasard. Quand elles aboutissent, « tout le réseau informatique de l’entreprise se retrouve crypté, inutilisable », déplore l’enquêteur. « Bien souvent, la seule solution est de payer pour tout rétablir. Cette année, j’ai eu le cas de trois PME qui ont subi cette attaque. Dont ce petit artisan du bâtiment du département, avec seulement deux ou trois employés. Il a appelé le matin, on a tenté de voir ce qu’il avait comme protocole de sécurité… Mais on n’a rien pu faire. » Le chef d’entreprise a dû payer environ 400 € pour remettre son réseau en état.
S’il faut souvent se résigner, c’est que la cybercriminalité est en grande partie internationale. L’enquête mène souvent à l’étranger. « Et si le pays concerné n’a pas signé d’accord avec la France, dans les pays de l’Est par exemple, en Russie, en Biélorussie, l’enquête ne peut plus avancer. » À moins de lancer une commission rogatoire internationale, ce qui est très rare. « En fait, mon travail est de remonter la piste le plus loin possible, parfois jusqu’à un mur. »
Ces coopérations entre certains pays et la France se nouent toutefois de plus en plus. « Des liens récents avec la Côte d’Ivoire ont permis d’arrêter plusieurs “brouteurs”, confie l’enquêteur N-Tech. Mais il n’y a jamais de dédommagement, c’est là que c’est rageant. »