TEMOIGNAGES
« Nous ne voulons pas de la dissolution du 11/3. »
« L’Essor » a rencontré des gendarmes mobiles de l’escadron 11/3 de Rennes. Cet article mélange les citations anonymes de nombreux sous-officiers qui ont tenu à nous faire part de leur amertume et de leur colère face à ce qu’ils considèrent comme une véritable injustice.
Nous reviendrons plus longuement sur ce sujet dans le prochain numéro de « L’Essor » à paraître fin février.
L’histoire de la dissolution de l’escadron 11/3 de Rennes (35) est celle d’une décision « incompréhensible ». Les gendarmes qui font partie de cette unité sont fiers de se trouver au sein d’un escadron « qui a une âme » et où le professionnalisme leur permet de s’acquitter de missions difficiles avec succès.
C’est cette cohésion qui leur a permis d’obtenir d’excellents résultats lors de leurs évaluations au Centre national d’entraînement des forces de gendarmerie de Saint-Astier (CNEFG). C’est pour cela que leur unité a été choisie pour partir six mois en Afghanistan effectuer une dangereuse mission de formation des policiers afghans. 46 militaires de l’unité sont donc partis à Kaboul, tandis que 16 autres s’envolaient pour l’Irak et 18 pour la Réunion.
Le retour des gendarmes envoyés en Afghanistan se voulait glorieux. Ils ont été accueillis avec les honneurs par la ville de Rennes qui leur a réservé le 26 novembre une cérémonie de haut vol dans les jardins du Thabor. Puis, l’escadron a été placé en indisponibilité, le temps pour ces militaires méritants de prendre enfin les congés bien mérités qu’ils avaient accumulés.
« Un coup de massue »
Le 31 janvier, le commandement rassemble les quelques gendarmes présents (12 seulement sur les 104 militaires de l’escadron) et leur annonce la nouvelle « l’escadron 11/3 sera dissout au 1er septembre ».
A charge pour eux de téléphoner aux autres membres de l’unité pour leur annoncer la nouvelle. Certains sont en effet sur leur lieu de vacances, d’autres sont sur place, mais tous reçoivent la nouvelle comme un coup de massue.
« Nous sommes tombés des nues. Nous n’aurions jamais cru que Rennes pouvait faire partie de la liste des escadrons dissous, tellement cela paraissait improbable. »
En effet, les gendarmes savaient que, dans le cadre de la Révision générale des politiques publiques (RGPP) quinze escadrons devaient disparaître. Cependant, « la Direction générale avait annoncé au Conseil de la fonction militaire gendarmerie (CFMG) que les critères qui prévaudraient à la disparition d’une unité étaient clairs : pas plus de deux escadrons dissous par département et cela ne concernerait que les unités dont les locaux sont jugés insalubres. Nous n’avions donc aucune raison de penser que nous pouvions être concernés. »
En effet, l’escadron de Saint-Malo (35) dont les locaux étaient en très mauvais état, avait été dissous le 1er septembre 2010. Huit gendarmes de cette unité venaient même de rejoindre l’escadron de Rennes.
Hasard malencontreux ? Le jour même où ils apprenaient la disparition de leur unité, le ministre de l’intérieur Brice Hortefeux annonçait qu’il revenait sur sa décision de dissoudre deux compagnies de CRS après un bref mouvement de protestation des fonctionnaires de police.
« Même s’il n’y a aucun rapport, nous ne pouvons pas nous empêcher de faire le lien. Sauf que nous sommes dans la grande muette, et que notre disparitions ne fait pas de bruit« .
La grogne monte aussitôt au sein des militaires de l’escadron et de leur famille.
La direction générale dépêche aussitôt le général de corps d’armée Joël Delponts, directeur du personnel pour calmer les esprits. Il est accueilli à l’entrée de la caserne par les familles très remontées.
« Vous avez votre scoop ? Maintenant dégagez ! »
Les tentatives du commandement local de les dissuader de tenir ce piquet à l’entrée de la caserne en leur demandant de quitter les lieux avant l’arrivée du général ont d’ailleurs été très mal perçues par les épouses en colère qui ont refusé d’obtempérer. Tout autant que cette phrase lâchée par un officier supérieur après le départ du général Delponts pour la réunion : « C’est bon, vous avez votre scoop? Maintenant dégagez ! ».
« Depuis le début de cette affaire, nous ne sentons que du mépris, pour nous comme pour nos familles », explique un gendarme. »
C’est d’autant plus dur pour elles que, si nous avons signé notre engagement en Gendarmerie en pleine connaissance de cause, nos épouses n’ont rien choisi. Elles en subissent pourtant toutes les conséquences.
Vous imaginez ce qu’ont représenté les 6 mois de missions en zones de guerre, à s’occuper seules de l’ordinaire de nos familles et à s’angoisser chaque fois que les chaînes d’information en continu rapportent un accrochage ? »