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INTERVIEW. Cyclone Chido : « La normalité prendra du temps à revenir, il faut y travailler dès maintenant », assure le colonel Olivier Casties, commandant en second de la gendarmerie de Mayotte
Depuis deux semaines, Mayotte tente de se relever après le passage du cyclone Chido. À ce jour, les autorités indiquent que les routes du département sont toutes dégagées des arbres qui étaient tombés, « grâce au travail des forces de secours ». Depuis la catastrophe, près de 1 600 membres des forces de l’ordre sont déployés sur tout le territoire, et leurs missions sont nombreuses. Pour Outremers360, le Colonel Olivier Casties, Commandant en second de la gendarmerie de Mayotte, fait le point.
Outremers360 : Quelles sont les missions de la gendarmerie depuis le passage du cyclone Chido ?
Colonel Olivier Casties : Nous exécutons des colonnes de reconnaissance dans les zones dévastées, durant lesquelles nous distribuons des vivres et prodiguons des soins. Nous escortons toutes les livraisons d’eau et de denrées dans les villages. Plusieurs centaines de militaires patrouillent chaque nuit pour assurer le respect du couvre-feu. Plusieurs centaines d’autres patrouillent chaque jour pour limiter les pillages et les exactions en tout genre. Nous sécurisons également l’intervention des agents d’EDM et d’EDF dans les écarts, afin d’accélérer le retour de l’électricité. Hier, les gendarmes mobiles sont intervenus à l’hôpital de Petite Terre pour dégager les gravats qui envahissaient la salle de soins principale. La gendarmerie exécute donc ses missions traditionnelles dans un contexte extraordinaire.
Comment la gendarmerie a-t-elle coordonné ses efforts avec les autres autorités locales et les services de secours ?
Sous l’autorité du préfet, au sein du Centre Opérationnel Départemental (COD), l’ensemble des acteurs ont pu coordonner leurs actions respectives. Dans les premières heures, toutefois, les réseaux de communication étant tous inopérants, le maillage territorial de la gendarmerie et les relations de proximité que les gendarmes savent entretenir au quotidien avec les acteurs locaux ont permis la mise en œuvre concertée des premières mesures de sauvegarde, avec les partenaires qui se sont présentés.
Comment la chaîne de commandement a-t-elle fonctionné pendant le cyclone ?
L’organisation de la gendarmerie de Mayotte, autour de son COMGEND (le commandement de la gendarmerie outre-mer), de ses deux commandants de compagnie, de nos sept commandants de brigades et du dispositif de la gendarmerie mobile, commandé par un colonel à la tête du groupement tactique et de son adjoint, est demeurée parfaitement efficiente. Avec le général Barth, commandant de la gendarmerie de Mayotte, nous nous doutions que la puissance du phénomène annoncé nécessiterait que je me projette 24 heures à l’avance sur Grande Terre, ce qui a été fait. Les objectifs étant préalablement partagés, nous avons ainsi été immédiatement en mesure de commander la manœuvre, même en l’absence de moyens de communication.
Avez-vous reçu des appels d’urgence pendant le cyclone ?
Les appels ont été très peu nombreux. Tant que le phénomène ne nous en a pas empêchés (je pense que tout le monde a compris à présent ce que des vents de 220 km/h pouvaient produire comme effet), nous nous sommes portés auprès de la population. Il y avait essentiellement des appels au sujet de la localisation et de la disponibilité des refuges. Comme ces derniers étaient nombreux et prêts à accueillir les personnes, nous avons pu massivement accompagner ces mises à l’abri.
Avez-vous constaté des problèmes de vols, d’agressions ou de troubles ?
Il n’a échappé à personne que l’ensemble du département est dévasté. Magasins, doukas, habitations éventrées ont parfois fait l’objet de vols de nécessité qui, très clairement, ont ajouté au malheur de leurs différents propriétaires. Notre présence massive sur le terrain nous permet chaque jour d’interpeller en flagrant délit les auteurs de ce type de prédation. Les troubles à l’ordre public, notoirement connus sur le territoire, sont généralement en baisse, bien qu’à nouveau naissants. C’est là aussi regrettable, étant donné le malheur qui s’est abattu sur nos deux îles… Émeutiers et cambrioleurs nous trouveront, comme à l’accoutumée, sur leur chemin, et j’insiste pour dire que la situation générale ne modifie en rien notre absolue détermination à combattre les délinquants.
Quels sont les défis majeurs pour ramener une situation normale à Mayotte ?
La normalité prendra du temps à revenir, ce qui veut dire qu’il faut y travailler dès maintenant. On peut aussi, à ce sujet, s’interroger sur la nature de ladite normalité que nous souhaitons voir advenir pour ce territoire… Dans l’immédiat, nous voulons naturellement tous pouvoir disposer dans les plus brefs délais d’eau, d’électricité, de nourriture et de moyens de nous déplacer. Tout le monde y travaille avec une énergie décuplée. Ensuite viendra, pas à pas, le temps de la reconstruction.
Propos recueillis par Abby Said Adinani