Vendée : les gendarmes de La Roche-sur-Yon devront-ils finalement payer les rappels de charges de chauffage ?
Les gendarmes qui avaient obtenu l’annulation de leur rappel de facture de chauffage en 1er jugement, risquent de voir ce jugement cassé, sur demande du ministère de l’Intérieur.
Publié le 2 Juin 23 à 15:08
Le ministère de l’Intérieur a demandé à la cour administrative d’appel de Nantes, ce vendredi 2 juin 2023, de supprimer les jugements du tribunal administratif de Nantes qui avaient annulé les « rappels de charges de chauffage » qu’il avait envoyés à quinze gendarmes de la caserne Gouvion de La Roche-sur-Yon (Vendée) pour 2013.
700 à 2000 € chacun
Ces militaires s’étaient vu réclamer « de 700 à 2 000 € chacun ».
Ils estimaient que ces rappels de charges locatives étaient illégaux dans la mesure où ils ne sont justifiés par aucun relevé individuel de leur consommation de gaz.
« La circulaire du 28 décembre 2011 relative à la gestion des charges d’occupation au sein de la gendarmerie (…) est illégale en tant qu’elle interdit expressément l’individualisation des frais de chauffage », avait indiqué leur avocat, Me Grégoire Tertrais, lors d’une première audience le 27 septembre 2022.
Or, « tout immeuble collectif pourvu d’un chauffage commun doit comporter (…) une installation permettant de déterminer la quantité de chaleur et d’eau chaude fournie à chaque local occupé à titre privatif », indique le code de l’énergie.
« La caserne Gouvion de La Roche-sur-Yon est équipée d’appareils permettant d’individualiser ces frais », rappelait l’avocat vendéen.
De plus, « l’éloignement de la chaudière collective provoque une déperdition énergétique importante », a-t-il précisé.
« De même, les surfaces de locaux techniques de la caserne, aux volumes conséquents, ont été pris en compte dans la répartition des charges. »
Ce vendredi 2 juin 2023, devant la cour administrative d’appel de Nantes, la rapporteure publique a proposé de désavouer une nouvelle fois la Gendarmerie nationale : une jurisprudence du Conseil d’Etat est venue confirmer entre-temps que les casernes de gendarmerie « ne sauraient se soustraire au principe d’individualisation » des factures de chauffage.
La magistrate a suggéré au passage de la condamner à verser 1000 € de frais de justice à chacun des quinze requérants.
Le Ministère non représenté à l’audience
L’un de ses homologues devant le tribunal administratif de Nantes avait déjà dit, lors d’une précédente audience en septembre 2022, « ne pas bien comprendre » pourquoi le ministère de l’Intérieur « s’arc-boute » sur son argumentation initiale.
Celui-ci ne s’est pas davantage expliqué ce vendredi : il n’était ni présent ni représenté par un avocat à l’audience…
Réponse du tribunal dans une semaine
Me Laure Gobé, l’avocate des quinze gendarmes vendéens, a souligné la « lassitude » de ses clients « face à l’obstination du ministère » de l’Intérieur : la jurisprudence est désormais « établie » et cet appel de l’administration est donc « manifestement infondé ».
Le litige n’est toutefois pas près de se clore puisque « de nouveaux avis de régularisation » de factures de chauffage ont été envoyés entre-temps aux gendarmes pour des années postérieures à 2013, notamment « pour 2018 ».
L’avocate a confirmé au passage qu’elle allait « contester » ces demandes, dans un litige devenu désormais « récurrent » et « annuel » pour son cabinet.
Des « cageots de requêtes » ?
Le président de la cour administrative d’appel de Nantes s’est donc inquiété de recevoir prochainement « des cageots de requêtes » et s’est demandé si une « proposition de médiation » avait été faite dans ce contentieux.
Le Conseil d’Etat, la plus haute juridiction administrative française, encourage en effet depuis plusieurs années les justiciables et les administrations à avoir recours à ce mode de règlement alternatif de leurs litiges pour désengorger les différents tribunaux administratifs.
Mais « aucune discussion » en ce sens n’a été entamée, lui a répondu Me Laure Gobé.
Dans l’immédiat, la cour administrative d’appel de Nantes a prévu de rendre ses arrêts sous une semaine, un délai plus court qu’à l’habitude : deux autres salves de requêtes du même type doivent être examinées lors de ses audiences du 16 et du 30 juin 2023.