En Creuse, les chauves-souris, sont nourries, logées, blanchies à la gendarmerie !
Publié le 20/12/2022 à 09h00
Le gîte d’hibernation grand format en béton de bois, qui pèse une vingtaine de kilos, a été installé à plus d’une vingtaine de mètres de haut, sur la façade est d’un des bâtiments de la caserne © BARLIER Bruno
Aux deux abris à hérissons et six gîtes d’été destinés aux chauves-souris dans l’enceinte de la caserne de gendarmerie Bongeot, s’ajoute désormais un gîte d’hibernation pour ces dernières. Installé mercredi dernier par le GMHL, il permettra aux populations de chiroptères qui gravitent autour des bâtiments d’hiverner également sur le site.
Mission de la matinée pour le gendarme Envel Chéroux : aider le GMHL à installer un gîte d’hibernation pour les chauves-souris à une vingtaine de mètres du sol. Une première pour lui. « Je ne m’attendais pas vraiment à ça ce matin mais c’est de nouvelles découvertes, c’est intéressant. Ça fait partie des missions de la gendarmerie, c’est divers et varié ! », sourit-il, caisse à outils et échelle sous le bras. D’autant que ce gendarme a de la sympathie pour ces petites bêtes.
Antoine Roche, chargé de mission au GMHL, le gendarme Envel Chéroux et le capitaine Rémi Grulois ont passé la matinée sur le toit de la gendarmerie pour installer ce dernier gîte @Bruno Barlier
Tout comme le chef du groupe soutien ressources humaines, le capitaine Rémi Grulois, à l’initiative de ce projet (*) mené en partenariat avec le GMHL. Débuté à la fin 2021, il s’est concrétisé cet été avec l’installation de gîtes de reproduction pour les chauves-souris et de deux abris à hérissons dans l’enceinte de la caserne Bongeot, en plein Guéret.
Le tout premier gîte de ce type en Creuse
« On est heureux de terminer cette première phase d’installation avec le Groupement mammalogique et herpétologique du Limousin, heureux aussi de pouvoir enchaîner sur la suite », confie Rémi Grulois. La suite, ce sera le suivi scientifique des populations de chauves-souris et de hérissons qui s’installeront dans ces gîtes et abris, que mènera le GMHL.
« C’est intéressant, bien sûr, d’installer des abris pour la petite faune, ça permet de compenser la perte de gîtes et d’abris naturels dans les zones urbaines mais c’est aussi intéressant de pouvoir étudier les espèces qui vont se les approprier »
ANTOINE ROCHE (chargé de mission au GMHL et médiateur faune sauvage)
La pose de ce septième gîte à chauve-souris s’est déroulée sous l’oeil du capitaine Grulois (en bleu), à l’initiative de ce projet en faveur de la biodiversité@Bruno Barlier
Dans les différents gîtes, le naturaliste espère trouver au cours de ses prospections des pipistrelles, des barbastelles ou encore des sérotines. L’objectif, c’est d’observer si ces abris artificiels leur sont bénéfiques, si les populations sont présentes et en bonne santé, d’autant que toutes les espèces de chiroptères sont menacées par la disparition de leurs habitats, de leur nourriture et par toutes les formes d’activité humaine.
Le gîte installé ce mercredi matin est un peu différent des six autres. C’est un gîte d’hibernation de grand format, en béton de bois, qui peut accueillir jusqu’à 100 chauves-souris. C’est aussi le tout premier de ce type à être installé en Creuse.
L’installation de ce gîte, le premier en Creuse de ce type, a nécessité une paire d’heure de travail afin d’être fixé sur une des façades de la gendarmerie @Bruno Barlier
« C’est un nichoir au top du top, il est isolé pour ne pas descendre trop en température même en hiver, ce qui permet aux chauves-souris d’hiberner dedans, contrairement aux nichoirs en bois qu’on privilégiera pour des gîtes été », précise Antoine Roche.
Car en hibernation, les chauves-souris font baisser leur température corporelle quelques degrés au-dessus de la température ambiante (entre 1 °C et 10 °C selon les espèces) mais la congélation leur serait mortelle. C’est la raison pour laquelle on les rencontre souvent dans les caves l’hiver où elles trouvent des conditions idéales pour hiverner. Dans ce gîte 4 étoiles, les colonies présentes sur et autour de la caserne trouveront un lieu d’hibernation sûr et accessible. Il a été installé plein est, juste à côté d’un gîte d’été pour faciliter son repérage.
« Il est trop tard pour qu’elles l’occupent cet hiver, elles sont déjà entrées en hibernation mais à la belle saison, quand elles rechercheront des gîtes d’été pour se reproduire, elles pourront le localiser et l’investir l’hiver prochain »
ANTOINE ROCHE (chargé de mission au GMHL et médiateur faune sauvage)
@Bruno Barlier
Après son installation, qui a demandé un peu de technique et de temps, Antoine Roche en a profité pour inspecter les autres gîtes afin de voir s’ils ont été occupés. « On regarde dedans grâce à un miroir avec la lumière du soleil ou avec une lampe artificielle pour ne pas déranger d’éventuels occupants. On peut aussi utiliser un endoscope pour regarder à l’intérieur des abris à hérissons », détaille le naturaliste. Pour l’instant, pas de locataires mais « rien de grave ni d’anormal. Il faut laisser du temps à la nature pour trouver la place qu’on lui laisse », sourit Antoine Roche.
Un projet qui fait déjà des émules parmi les administrations du département
@Bruno Barlier
Le capitaine Grulois, qui doit partir pour la région parisienne en mars prochain, passera le relais de ce joli projet à sa successeure. Il espérait aussi pouvoir mettre en place des animations avec les écoles notamment, autour de la biodiversité accueillie à la caserne. « J’en ai reparlé avec elle, je pense qu’elle va poursuivre les choses. Elle vient de Savoie où ils n’ont pas eu l’occasion de mettre ce genre de projet en place et elle trouve ça très intéressant », confie-t-il.
Pourquoi pas aussi développer plus encore l’axe “accueil” de la petite faune : « On a une grande surface foncière ici, on pourrait installer d’autres choses pour d’autres espèces, pourquoi pas pour les oiseaux », imagine Rémi Grulois. En tout cas, le capitaine partira vers Paris avec le sentiment d’un devoir accompli et pas mal de fierté !
« Ça rehausse l’image de l’institution. Ça nous fait connaître sous un autre jour. Ce n’est pas forcément notre cœur de métier donc ça peut surprendre, ça a même surpris certains personnels de la caserne mais c’est une bonne chose. »
CAPITAINE RÉMI GRULOIS
Mission réussie pour le GMHL et la gendarmerie de Guéret ! Les gîtes sont fin prêts à être investis par les chauves-souris @Bruno Barlier
L’exemple de la gendarmerie commence déjà à faire des émules se réjouit Antoine Roche. « En entendant parler de ce projet, plusieurs administrations creusoises nous ont contactés pour installer à leur tour des abris pour la faune sauvage. »
(*) Le capitaine Grulois a répondu à un appel à projet du ministère de l’Intérieur en faveur de la biodiversité.
Texte : Julie Ho Hoa
julie.hohoa@centrefrance.com
Photos : Bruno Barlier