Joué-lès-Tours : à la caserne Dutertre, la fronde des familles de gendarmes
Publié le 06/09/2022 à 06:25 | Mis à jour le 06/09/2022 à 10:27
Les trois tours où logent les gendarmes et leurs familles se dégradent. Absence de chauffage ou d’eau chaude, problèmes électriques, etc. La liste est longue et agace. Des travaux sont prévus.
Dans leur discours, on sent de la lassitude, de l’inquiétude et de la colère. Depuis des mois, elles constatent impuissantes la dégradation de leurs conditions de vie. Elles sont femmes de gendarmes. Femmes de militaires membres de l’escadron 36/3 de gendarmerie mobile installé dans la caserne Dutertre de Joué-lès-Tours. « On parle aujourd’hui parce qu’on a l’impression que la hiérarchie attend qu’il y ait un mort ou un accident grave (1) pour débloquer des budgets », confie une première, qui souhaite garder l’anonymat, comme les quatre autres femmes rencontrées. Toutes sont membres d’un collectif de dix à vingt compagnes de gendarmes monté pour dénoncer leurs conditions de vie.
« On a allumé le four pour faire de la chaleur »« Certaines ont peur de parler et des répercussions sur la carrière de leur conjoint », ajoute la première. « Il faut du courage pour prendre la parole. Mais il faut dire les choses. L’hiver approche et ça nous fait peur« , souffle une deuxième. Elle se souvient du Noël 2021, « passé dans un logement sans chauffage à 14 °C. La mairie de Joué a prêté des radiateurs. » « On a allumé le four pour faire de la chaleur », glisse une autre, en surveillant ses enfants du coin de l’œil.
Un ascenseur s’est écrasé sur le plafond du 12e étage« Quand nos conjoints sont en mission à des milliers de kilomètres (2), on reste seules avec nos enfants. L’hiver dernier, nous n’avons pas eu d’eau chaude pendant trois mois. En tant qu’adulte, on serre les dents mais pour les enfants, ce n’est pas possible », tonne une quatrième femme.
« On s’est débrouillées en faisant chauffer de l’eau dans une bouilloire et en la mélangeant à de l’eau froide… On nous a aussi proposé d’aller nous laver à la caserne Raby de Tours. Ce n’est pas sérieux », grimace la cinquième et dernière.
Dans une des trois tours où sont logées les familles, un ascenseur est hors service. « Il est monté et s’est écrasé sur le plafond du douzième étage. On a évité un drame. Depuis, il est hors de question que mes enfants prennent l’autre ascenseur », reprend la deuxième femme interrogée. Les spots lumineux d’un ascenseur d’une autre tour auraient pris feu à la fin de l’année 2021.
Je ne consomme plus l’eau de la caserne Une femme de gendarme de la caserne Dutertre
« Avec ces problèmes, une femme enceinte a fait un malaise cet été. Elle a pris l’escalier et ne s’est pas sentie bien », souffle la première. Et la liste des soucis s’allonge encore avec l’état des tuyauteries. « On a souvent un fort taux de légionelles dans l’eau. C’est testé une fois par an seulement. Je ne consomme plus l’eau de la caserne. On constate aussi des problèmes sur le réseau électrique avec des étincelles qui sortent des prises quand on branche quelque chose », soupire la quatrième femme.
« Les gendarmes et leurs familles font régulièrement des travaux d’isolation, de tapisserie. On répare nos volets aussi », liste la première, qui constate « des ruptures fréquentes des canalisations » et « que des familles déménagent de la caserne pour être plus tranquilles. On a conscience de la chance que l’on a de ne pas payer de loyer mais on demande de la sécurité. On nous dit que des changements arrivent mais on ne voit rien venir. »
« Tous les dossiers sont pris en compte »De son côté, la gendarmerie indique que « différents dossiers concernant la caserne Dutertre sont en cours de traitement et de résolution par les entités responsables de leurs suivis. Notre hiérarchie est pleinement impliquée à tout niveau. Tous les dossiers sont pris en compte de façon à ce que des travaux soient engagés pour résoudre les problèmes. »
(1) Le 10 décembre 2021, un arc électrique a touché un militaire de la caserne. Par chance, il s’en est sorti. L’incident avait entraîné une coupure électrique géante sur plus de 3.000 compteurs de Joué entre la Liodière, le Morier et la caserne Dutertre.
(2) L’escadron 36/3 exerce des missions régulières loin de la Touraine. Il a passé trois mois en Guyane l’an dernier.