Il avait laissé un gendarme pour mort, il est condamné 12 ans plus tard
Le 2 juin 2000, un gendarme nord-isérois était victime d’une tentative d’assassinat dans l’exercice de sa fonction. Son agresseur a été condamné 12 ans après pour tentative d’assassinat. «Je peux enfin tourner la page, mais le livre ne se refermera jamais». Tout juste de retour d’Alger, ce gendarme nord-isérois de 43 ans est encore tout ému. Il vient de vivre l’épilogue d’une douloureuse affaire et interminable procédure judiciaire. Le 2 juin 2000, il avait été victime d’une tentative d’assassinat dans l’exercice de sa fonction. Il était resté dix jours dans le coma. Ce mercredi, le tribunal criminel de Oum el Bouaghi (ville située à 100 km au sud de Constantine) a reconnu Akim Slimani coupable de tentative d’assassinat.
« Rien n’était gagné d’avance, mais j’ai toujours gardé confiance »
« Il n’aurait jamais lâché, il est allé jusqu’au bout tout comme il le fait au quotidien dans ses enquêtes. Son obstination a fini par payer », nous confiait hier soir l’un de ses supérieurs hiérarchiques.
« Rien n’était gagné d’avance, mais j’ai toujours gardé confiance. C’est serein que je me suis envolé pour l’Algérie », raconte le gendarme. Un énième procès dont il a été informé il y a seulement 15 jours. « C’est le strict hasard que ce procès se soit tenu durant la visite du président Hollande à Alger », assure-t-il.
Durant le trajet le menant sur le sol africain, ce militaire père de famille n’a cessé de ressasser les 12 dernières années de sa vie. 12 années d’espoirs et de découragements, de rebondissements et de quête : la tentative d’assassinat, un premier procès aux assises du Rhône, un deuxième procès en Algérie…
Dans la nuit du 3 juin 2000, appelé sur une série de vols à la roulotte, le gendarme est violemment agressé, laissé pour mort (lire ci-contre). Six mois plus tard, après avoir subi plusieurs chirurgies faciales, il reprendra du service en Isère. Avec l’espoir que justice soit un jour rendue. Les enquêteurs ont rapidement des éléments : une empreinte digitale retrouvée sur une cannette de bière découverte auprès du corps du gendarme et provenant justement d’un vol à la roulotte. Puis un second élément vient conforter l’enquête : lors d’un transfert à la prison de Saint-Quentin-Fallavier, un détenu dénonce à son escorte l’auteur présumé et ses complices.
Parfaitement identifié, l’agresseur, en libération conditionnelle la nuit de la tentative d’assassinat, a cependant pris la fuite en Algérie. Le 15 février 2008, la cour d’assise de Lyon condamnera par contumace Slimani à 30 ans de réclusion criminelle. Un mandat international sera alors lancé.
De nombreuses démarches intergouvernementales sont alors entreprises avec l’Algérie, en relation avec l’attaché de sécurité intérieur en poste à l’ambassade de France en Algérie. Puis, c’est par le plus pur des hasards que, le 22 août 2011, le gendarme isérois prend connaissance d’un jugement criminel de la cour d’Oum el Bouaki, innocentant Slimani. « C’était hallucinant, le procès a été mené à décharge. Plus fort, je n’ai jamais été convoqué en tant que partie civile. Fort heureusement, le parquet général avait fait appel et le jugement a finalement été cassé par la Cour suprême d’Algérie ».
Ce mercredi, le procès en appel s’est donc tenu. « Lui avait été interpellé 48 heures auparavant, c’est comme cela en Algérie. Il était en costume cravate. Je l’ai reconnu de suite, malgré ses 12 années de plus. Lui ne m’a jamais regardé pendant le procès ». Après 3 heures de débat et pas plus de 20 minutes de délibéré, le verdict est tombé : 10 ans d’emprisonnement. « J’ai retenu mes larmes, les policiers et les gendarmes présents à l’audience m’ont pris l’épaule, comme pour me dire qu’il fallait avoir confiance en la justice algérienne ».
*Le gendarme a souhaité garder l’anonymat.
Source: www.ledauphine.com le 22/12/2012.