JUSTICE
Viol entre gendarmes à Besançon : un an de
prison ferme
Même si le dossier a finalement été « correctionnalisé », les juges devaient bel et bien statuer sur un fait de viol, commis en 2014 dans les W.-C. d’un restaurant bisontin. La notion de consentement fut au cœur des débats. Un ex-gendarme adjoint volontaire a été condamné.
- LE 20/04/2017 À 18:04
- MIS À JOUR À 07:29
Toute la difficulté de cette affaire – requalifiée « en agression sexuelle » au lieu de « viol » pour pouvoir, avec l’accord de la victime, être jugée au tribunal correctionnel – se cristallisait sur la nature consentie ou non d’une relation sexuelle. Celle-ci concernait Marc et Noémie*, alors gendarmes adjoints volontaires, dans les toilettes d’un restaurant de Besançon.
Ce 24 octobre 2014, un de leur collègue du Fort des Justices fête une promotion. Noémie se rend aux W.-C., Marc quitte la terrasse de l’établissement et suit le même chemin. « Par hasard », affirme-t-il. Tous deux sont alcoolisés. Le grand brun attend qu’elle sorte des toilettes pour l’embrasser par surprise. Il introduit alors dans son vagin un doigt puis son sexe, une pénétration de trois à quatre minutes interrompue par un tiers frappant à la porte, fermée à clé par Marc.
Les versions des deux protagonistes s’opposent. Marc, 1,80 m, 100 kg, affirme que le baiser était réciproque, et qu’elle n’a pas exprimé de refus, bien au contraire. Noémie, 1,53 m, 50 kg, qu’elle s’est retrouvé dans un état de sidération et de honte tel que non, elle n’a pas crié. Mais qu’à deux reprises, elle l’a supplié « d’arrêter ». Qui croire ?
Tous deux sont présents à l’audience, accablés. Recroquevillée sur sa chaise, Noémie ne trouve pas la force de prendre la parole. Ambiance tendue. Concentration maximale des juges. L’enjeu est important.
La relation de « camaraderie » entre ces deux ex-apprentis gendarmes est décortiquée, notamment à travers des échanges de SMS antérieurs à l’acte sexuel. Un versant de séduction se dessine. Lui apparaît entreprenant et volage. Elle, fuyante, mais peut-être flattée. A aucun moment, elle ne cède à ses avances. Tout le monde présente par ailleurs Noémie comme timide, très réservée.
Les SMS expédiés au lendemain des faits ne plaident pas en faveur de Marc. « Tu crains de m’avoir fait ça, je n’étais pas d’accord et tu en as profité car j’étais bourrée », lui reproche-t-elle. « Je m’en veux sincèrement », dit-il… Expliquant à la barre, ce mercredi, qu’il regrettait en fait d’avoir trompé sa compagne de l’époque. « Je ne vous crois pas », lui rétorque la présidente du tribunal.
« À aucun moment, ma cliente n’a formulé de consentement ! », insiste pour sa part Me Pétament, « C’est difficile pour une victime de s’entendre dire que c’est une menteuse. À ce jour, elle a encore de grande difficulté à surmonter cette épreuve. » Une ligne également suivie par la procureure de la République, Alexandra Chaumet : « On a affaire à un homme qui n’a pas compris le terme de refus, alors que lui, et lui seul, avait une envie. Dans sa propre imagination, elle était d’accord. »
Me Kabbouri fait de gros yeux et tente, avec verve, de démonter la théorie de la surprise évoquée par la victime : « Elle ne dit “arrête” que quand on frappe à la porte. Il y a une acceptation tacite. Tout le monde perd pied dans ce dossier ».
Les juges n’ont pas suivi l’avocate de la défense, qui espérait une relaxe. Mais contrairement à ce qui était requis par le ministère public, Marc évite l’inscription sur le fichier judiciaire automatisé des auteurs d’infractions sexuelles (FIJAIS).
* Pour respecter l’anonymat de la victime, les prénoms ont été modifiés.