Arras :
une unité de gendarmerie formée à la langue des signes, une première en France
(VIDÉO)
PUBLIÉ LE 26/02/2015
Trois gendarmes sont actuellement formés à la langue des signes au sein de l’association Trèfle, à Arras. D’ici fin 2015, les cinq gendarmes de la brigade de prévention de la délinquance juvénile du Pas-de-Calais seront formés. Une première en France.
Ce qui frappe en assistant à un cours de langue des signes, c’est le silence. Seul le son du marqueur qui couine sur le tableau blanc rompt ce silence. Les élèves répètent les gestes, se corrigent, sont repris par la formatrice. Et entre des parents d’enfants sourds et une éducatrice en formation figurent trois gendarmes de la brigade de prévention de la délinquance juvénile (BPDJ) du Pas-de-Calais, basée à Arras. Un gendarme a déjà été formé. Les autres suivront jusqu’à la fin de l’année, ce qui fera de la BPDJ la seule unité de France formée en la matière.
Tout a commencé en 2013 lors d’une intervention de la gendarmerie au centre d’éducation pour jeunes sourds d’Arras. Le capitaine Petit découvre l’engouement des jeunes pour le discours préventif des gendarmes. Mais un certain sentiment de frustration naît, les propos et questions passant par un interprète. Or, régulièrement, la BPDJ est amenée à entendre des mineurs sourds victimes ou auteurs de délits, en plus des interventions préventives (conduites addictives, usage d’Internet…) « C’est aussi à nous, service public, de faire l’effort», analyse le gendarme Anthony Dupont, actuellement formé.
Garantir l’égalité des droits
À force de multiplier les démarches, le capitaine Petit a décroché une subvention de la part de la Fondation de France, évaluée à 23 600 €. Les gendarmes suivent une formation de huit modules, soit huit semaines (cent vingt heures). L’objectif est de multiplier les interventions au CEJS, structure qui accueille quelque 270 enfants. Et surtout garantir l’égalité des droits des sourds, pas toujours bien informés.
Hier mercredi, les gendarmes Bourbon, Dupont et Petit en étaient à la moitié de leur formation. Des formations en décalé, réalisées en période de vacances scolaires, pour ne pas perturber le fonctionnement de la BPDJ. « Ils sont très motivés, ils posent beaucoup de questions, je suis aussi très à l’affût de ce qu’ils disent, je profite de leur présence, confie Carmen Flament, la formatrice. Par exemple je leur ai posé des questions sur l’obligation d’avoir un gilet fluo dans la voiture, je ne savais pas s’il en fallait plusieurs ou pas. »
Ce qu’en pensent les gendarmes
Le capitaine Petit : « la grosse difficulté arrive »
« C’est comme un langue, il faut apprendre le vocabulaire, c’est beaucoup de mots, il faut réviser. La grosse difficulté qui arrive, c’est la syntaxe, la grammaire, la place des mots dans les phrases, surtout quand on mélange plusieurs actions. Mais le milieu est très sympa. À terme, ce n’est pas le tout d’avoir cette formation, il faut aussi pratiquer. On a la chance d’avoir l’école des jeunes sourds à Arras. On voudrait y faire plus de formations, notamment en sécurité routière. »
Le gendarme Anthony Dupont : « pas de ridicule, au contraire ! »
« Il y a une super ambiance, l’accueil est familial, c’est la pédagogie qui est importante. Je n’y connaissais rien du tout. On y a passé beaucoup de temps. On ne se prend pas au sérieux, il n’y a pas de ridicule, bien au contraire. Je suis formateur anti-drogues. Il y avait une frustration car la formation était traduite, et donc pas directe. J’ai été surpris des questions très pertinentes des jeunes. Je tire mon chapeau aux interprètes. Mais c’est aussi à nous, service public, de faire l’effort ».