Tour de France: dans la caravane, la gendarmerie change d’image
AFP
A l’avant de la caravane publicitaire, ils exhortent la foule à « bouger son corps » sur les derniers tubes. Douze gendarmes, détachés de leurs fonctions ordinaires, veulent donner sur le Tour de France une image positive de leur institution, entre prévention et recrutement.
Dans la voiture de tête, deux gendarmes, buste dehors, saluent le public. Sur une autre, la sono diffuse les mêmes tubes toute la journée. Au micro, Christophe demande: « Vous êtes chauds à Châtellerault? » Sa binôme Laetitia interpelle des spectateurs préparant le déjeuner: « Eh, le barbecue, on arrive! »
Musique populaire, coups de klaxon, distribution des fameux « goodies » au bord de la route, la gendarmerie nationale est un élément de la caravane publicitaire presque comme les autres, si ce n’est qu’elle est ici pour prévenir les accidents et recruter.
Mardi, pour la 4e étape entre Saumur et Limoges, Anne-Lise Hugron, 29 ans, et Jonathan Martin, 31 ans, ont hérité de la voiture « Bravo », placée derrière « Alpha », le véhicule de commandement, devant « Charlie », la voiture des deux « voix », et « Delta ». Dans ces quatre automobiles, douze gendarmes qui ont été choisis pour cette mission bien spéciale.
Ils n’ont pas vocation à assurer la sécurité en amont du passage des coureurs: c’est la Garde républicaine qui encadre la course depuis des décennies. La police aussi est susceptible d’intervenir.
Cette différence de mission doit être visible: les gendarmes de la caravane arborent un polo jaune -clin d’oeil au maillot jaune du leader de la course- et leurs voitures customisées diffusent des messages tels que « 13.000 postes offerts en 2016 » ou « laissez passer les coureurs en toute sécurité ».
– Dangereux goodies –
Mais qui dit caravane, dit aussi goodies, ces babioles lancées sur le côté de la route qui déclenchent l’hystérie du public. Une activité bien encadrée en raison des risques qu’elle présente: les jets sont interdits à plus de 40 km/h, aux passages à niveau et dans les zones ceintes de barrières, comme les cols ou les sprints intermédiaires.
Car les goodies peuvent rebondir et échouer sur la route. Christophe et Laetitia sermonnent un adulte venu s’aventurer pour en récupérer un: « C’est nul, monsieur, c’est absolument ce qu’il ne faut pas faire! »
En tout, ces douze gendarmes vont jeter 115.000 porte-clés et magnets pendant un mois, soit 1.200 environ par voiture et par jour.
La gendarmerie participe à la caravane du Tour depuis sa création en 1930, lorsque le fondateur Henri Desgranges eut cette idée de génie pour financer l’épreuve: faire défiler les grandes marques sur le parcours, avant le peloton.
Pour Anne-Lise et Jonathan, c’est la première fois. « D’autres camarades l’avaient déjà fait. Ca change du quotidien », explique Jonathan, gendarme mobile à Antibes. « Je suis le Tour depuis que je suis petite, je voulais suivre une belle aventure », dit sa camarade, qui va intégrer le centre de formation et de recrutement de la gendarmerie à Nantes.
Le registre léger de la caravane mélangé au sérieux habituellement inhérent aux forces de l’ordre peut surprendre. « Ce n’est pas décalé », répond Anne-Lise. « Le public voit qu’on est ouvert. Cela peut rapprocher ceux qui appréhendent le côté répressif. On promeut la gendarmerie ».
« C’est un moyen de prévention en temps réel », ajoute Jonathan. « La gendarmerie n’a pas besoin de se racheter une image: les gens l’aiment déjà ».
Dans l’environnement rural et positif du Tour, le rapport gendarme-public est en effet celui de la proximité, sans conflit. Au départ de Saumur, la même blague gentillette revient: « Vous allez mettre des amendes? »
« Les gens sont positifs », se satisfait Jonathan, qui entend souvent « bravo » et « merci » mais reste conscient que l’enjeu le dépasse: « être aimés ou détestés, c’est suivant l’actualité ».
05/07/2016 19:11:50 – Limoges (AFP) – © 2016 AFP