Elle dédouane les gendarmes de toute responsabilité. Après deux rapports aux conclusions divergentes pour déterminer les causes de la mort d’Adama Traoré, l’expertise médico-légale de synthèse réalisée par quatre médecins a été rendue aux deux juges d’instruction le 18 septembre dernier.
Selon ce rapport que Le Monde a consulté, les médecins estiment que le décès du jeune homme de 24 ans fait suite à une réaction en chaîne après l’effort provoqué par sa fuite. Lors de son interpellation après une course-poursuite en 2016, Adama Traoré avait été maintenu au sol sous « le poids des corps » de trois gendarmes, selon les déclarations de l’un des militaires. La famille dénonçait depuis une « bavure » dans ce dossier qui avait entraîné plusieurs nuits de violences à Beaumont-sur-Oise.
Une contre-expertise partielle sur les organes avait confirmé l’an dernier une mort « par asphyxie » liée à un état de santé antérieur, sans permettre de trancher la question de la responsabilité des gendarmes. Selon cette dernière expertise, « le pronostic vital (était) engagé de façon irréversible » avant son arrestation, a expliqué à l’AFP une source proche du dossier, confirmant le rapport dévoilé par le quotidien.
Les conditions de cette interpellation « ont conduit au développement d’une composante d’asphyxie mécanique associée mais celle-ci reste contingente, et ne peut être retenue comme facteur déterminant du décès », développe cette source.
Mort d’Adama Traoré : ce que révèle la dernière expertise médicale
Dans le document, que « Le Monde » a consulté, les médecins estiment que la mort est due à une réaction en chaîne après l’effort provoqué par sa fuite.
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Par Nicolas Chapuis
Par son ampleur judiciaire et sociétale, l’affaire Adama Traoré était déjà hors normes. C’est désormais sur le plan médico-légal qu’elle défraie la chronique. Après deux autopsies consécutives, une expertise en 2016, une deuxième aux conclusions divergentes un an plus tard, la science peine toujours à répondre à cette question : de quoi le jeune homme de 24 ans est-il mort ?
Depuis son décès le 19 juillet 2016 à la gendarmerie de Persan (Val-d’Oise), la famille d’Adama Traoré n’a de cesse d’accuser les forces de l’ordre d’être responsables de l’asphyxie qui lui a été fatale, après une interpellation musclée. Les gendarmes auteurs de l’arrestation contestent cette version des faits. Mais la mobilisation de ses proches a provoqué un vaste mouvement de protestation contre les violences policières, qui dure depuis deux ans.
L’expertise médico-légale de synthèse, réalisée par quatre médecins et rendue aux deux juges d’instruction le 18 septembre, était donc très attendue. Ce nouveau – et probablement ultime – rapport n’apaisera pas la colère des membres de l’association Vérité et justice pour Adama. Les quatre experts, dans ce document que Le Monde a consulté, exonèrent les gendarmes de toute responsabilité.
Pratique sportive intensiveLes médecins commencent pourtant par battre en brèche les constatations de leurs confrères : non, Adama Traoré n’avait pas un cœur défaillant, contrairement à ce qu’avançaient les précédentes expertises. Sa taille importante était plus certainement due à sa pratique sportive intensive qu’à une malformation.
Pour expliquer le décès, les médecins décrivent un enchaînement de réactions, s’appuyant sur les différentes pathologies dont souffrait Adama Traoré. Il était atteint d’un « trait drépanocytaire », pour lequel il avait été diagnostiqué, et d’une « sarcoïdose de stade 2 », dont il ignorait l’existence. Selon eux, c’est la fuite du jeune homme – il avait échappé par deux fois aux gendarmes…