Féminicide dans le Bas-Rhin : la gendarmerie nationale saisit l’IGGN
Après le meurtre d’une quadragénaire par son conjoint devant les yeux de sa fille, dimanche dernier, Christian Rodriguez le directeur général de la gendarmerie nationale va saisir l’Inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN). Une décision qui intervient alors que la fille de la victime accuse la gendarmerie de laxisme, pour avoir mis trop de temps avant d’intervenir, et éviter le drame.
Afficher le diaporamaOuest-Franceavec AFPPublié le 12/11/2019 à 20h24
Ce mardi, Christian Rodriguez, le directeur général de la gendarmerie nationale a décidé de saisir l’Inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN). Une décision révélée par franceinfo pour « qu’un audit soit réalisé sur les conditions globales de l’intervention » des forces de l’ordre à Oberhoffen-sur-Moder dans le Bas-Rhin.
Pour rappel, un homme de 58 ans est soupçonné d’avoir tué à coups de couteau sa femme âgée de 40 ans, morte sous les yeux de sa fille dimanche soir à Oberhoffen-sur-Moder (Bas-Rhin), a été mis en examen mardi pour meurtre sur conjoint et écroué après ce nouveau féminicide qui suscite une vive émotion.
Déféré mardi à l’issue de sa garde à vue débutée dimanche, le suspect « a été mis en examen du chef de meurtre sur conjoint et placé en détention provisoire », a indiqué le parquet de Strasbourg.
La victime avait appelé « à l’aide »
La procureure de la République de Strasbourg, Yolande Renzi, avait indiqué un peu plus tôt dans un communiqué avoir requis une mise en examen « du chef d’assassinat ».
Mais selon la fille de la victime, interrogée lundi par France Bleu Alsace, l’homme, âgé de 58 ans, aurait porté plusieurs coups de couteau au niveau du cou et du thorax de sa compagne de 40 ans.
Les gendarmes ont été alertés dimanche peu après 23 h d’une dispute au domicile du couple. Les secours ont constaté « le décès de la jeune femme dont le corps se trouvait à l’extérieur de l’habitation commune, à proximité immédiate de la baie vitrée du salon », a détaillé la procureure de la République.
La fille de la victime a expliqué sur France Bleu Alsace que sa mère l’avait appelée « à l’aide » dimanche soir. « J’ai eu le temps d’escalader le portail, de fracturer la porte pour essayer d’entrer » et « voir ma mère se prendre le dernier coup de couteau dans la carotide. Elle s’est relevée, est venue vers moi et c’était fini », a-t-elle détaillé.
Une plainte déposée en octobre dernier
« Cela fait trois, quatre ans qu’ils étaient ensemble et trois, quatre ans qu’elle est rouée de coups, qu’elle n’a jamais voulu parler par peur pour elle et pour le défendre. On voit où ça mène aujourd’hui », a poursuivi la jeune femme.
Le parquet de Strasbourg a confirmé avoir été saisi d’une plainte de la victime en octobre « évoquant des disputes et des violences légères sans ITT établie sur fond d’alcool depuis plusieurs mois, ainsi que des menaces de dégradations de son véhicule proférées en juillet dernier ». Mais « personne n’a voulu nous écouter, personne n’a voulu nous aider », explique la file de la victime, pointant le temps mis par les forces de l’ordre pour arriver sur les lieux du crime.
Le suspect était convoqué « à une audience de décembre 2019 du chef de menaces de dégradations, les investigations réalisées n’ayant pas permis de caractériser d’autres infractions », a précisé Yolande Renzi dans son communiqué.
La gendarmerie se défend
« Deux ou trois jours avant, les gendarmes étaient déjà intervenus, elle ne voulait pas déposer plainte et a dit ne pas se sentir en insécurité. Nous ne pouvons pas imposer aux victimes de quitter leur domicile », a fait valoir de son côté la gendarmerie nationale.
Porte-parole de la gendarmerie nationale, Maggy Scheurer a expliqué sur BFMTV qu’à la suite du premier appel reçu pour une dispute conjugale, le mari avait lui-même téléphoné pour dire « qu’il a tué sa femme ».
« À partir du moment où le mari explique qu’il a tué sa femme, il ne s’agit plus pour la gendarmerie d’intervenir sur un différend familial mais sur un individu auteur présumé d’un homicide retranché chez lui et armé », ce qui nécessite « un certain nombre de précautions » et mobilise « plusieurs patrouilles », a expliqué Mme Scheurer.
La fille de la victime souhaite organiser une marche blanche en mémoire de sa mère, qui pourrait avoir lieu dimanche.
En 2018, 121 femmes ont été tuées lors de violences conjugales, selon le décompte officiel du ministère de l’Intérieur.