érignac ravive la mémoire d’un gendarme mort pour la France
Histoire – Archéologie, Sérignac, Tarn-et-Garonne
Publié le 11/11/2021 à 05:09
103 ans après l’Armistice du 11-Novembre, la mémoire de la Première guerre mondiale reste vive dans nos villes et nos villages qui ont payé un si lourd tribut humain dans les tranchées de Verdun, du chemin des Dames ou sur le front d’Artois et des Flandres.
A Sérignac, ce n’est pas le nom d’un Poilu mais celui d’un gendarme au parcours peu commun qui ressurgit de l’oubli. Il s’appelait Antoine Artigaud… un nom désormais gravé sur le monument aux morts de ce village de Lomagne qui, pour marquer l’événement, a mis sur pied une journée mémorielle ce samedi 13 novembre (lire ci-contre). « Avant qu’on consulte son registre matricule, personne ne savait qu’il avait été déclaré mort pour la France en 1921 en Corse », indique François Naud qui a collaboré, avec le groupe de recherche en histoire locale de l’association « La Lomagne, mémoire pour demain » à un ouvrage sur « La Grande guerre à Sérignac » qui sera présenté samedi. Il a notamment reçu l’aide de Sylvain Lafarge, adjoint au maire de Sérignac, un dentiste passionné d’histoire.
Antoine Artigaud, né le 13 décembre 1883 à Sérignac, était le fils d’un chiffonnier du village, Bernard Artigaud, décédé en 1894 à l’âge de 45 ans. « On n’a rien trouvé sur sa mère. Par contre, on sait qu’il s’est marié en 1911 à Castelsarrasin avec Jeanne Plantade, une couturière. Une fille naîtra de leur union en 1912 », précise François Naud. A 20 ans, le jeune Sérignacais est appelé sous les drapeaux. Avec la classe 1903, il effectue trois ans de service militaire à Montauban, au sein du 11e régiment d’infanterie. Séduit par l’uniforme, Antoine Artigaud entre en 1910 dans la 15e légion de la gendarmerie nationale. Dès le 23 août de cette année, il est affecté en brigade territoriale à Peri, en Corse. Quatre années passent.
Le 2 août 1914, c’est la mobilisation générale. Mobilisé, Antoine reste en Corse sous le statut de gendarme. Son action résolue lui vaudra de recevoir deux citations pendant la guerre. « Le 10 mars 1916, il s’emploie avec courage à la recherche de deux déserteurs dangereux », peut-on lire dans son livret militaire. Le 10 janvier 1918, il est à nouveau cité pour « avoir fait preuve d’énergie et d’initiative en arrêtant deux déserteurs qui tenaient le maquis depuis 2 ans. » Il ne tarde pas à bénéficier d’un avancement de grade. Le 10 août 1918, le voilà promu maréchal des logis-chef, commandant de brigade. Trois mois plus tard, c’est l’Armistice mais les troupes françaises ne sont pas démobilisées.
En février 1919, le chef Artigaud intègre la prévôté militaire. Il est envoyé en Grèce pour assurer la sécurité du rapatriement des troupes françaises depuis le port de Salonique. Au printemps, Antoine Artigaud retrouve la Corse. Il est affecté à la brigade de Santa-Maria-Siché. C’est là qu’il apprendra sa démobilisation le 23 août 1919. Sa mission sur l’île de Beauté s’achèvera tragiquement deux ans plus tard. Le 6 août 1921, lors d’un échange de tirs avec des individus recherchés, dans les montagnes de Zigliara, Antoine Artigaud est blessé. Le gendarme succombera à 38 ans. Reconnu « mort pour la France », il aura donc dû attendre 100 ans précisément pour que son destin soit inscrit sur le monument aux morts de Sérignac. Sa fille, Alice Marie-Antoinette, est décédée en 2009 à Toulon. En 1934, elle avait épousé un certain Victor Pagnac (lui-même mort en 1991) dont la famille possédait un négoce de plumes et chiffons à Saint-Nicolas-de-la-Grave. Mais malgré leurs recherches, François Naud et Sylvain Lafage n’ont pas pu retrouver de descendants. Leur présence aurait renforcé le caractère émouvant de la cérémonie de samedi.
Le programme de la journée mémorielle
Samedi 13 novembre, Sérignac donnera un lustre particulier à la commémoration de l’Armistice de 1918. A 11 heures, au monument aux morts, cérémonie d’hommage aux Poilus de la Grande guerre et à Antoine Artigaud. Inauguration de la gravure de son nom. A 12 h, apéritif dînatoire. A 14 heures, colloque de présentation de l’ouvrage « Sérignac dans la Grande guerre » édité par l’association « La Lomagne, mémoire pour demain », avec la participation de Laurent Ségalant, historien membre du Comité gersois pour la mémoire qui parlera de « La recherche historique et ses sources » ; Sylvain Lafarge, qui évoquera l’accueil des réfugiés à Sérignac pendant la guerre et François Naud, historien, qui interviendra sur le thème « De la nécessité de l’histoire locale ».
Pierre-Jean Pyrda.