EN SOUVENIR DU GENDARME DIEMERT
Le décès tragique du gendarme Diemert était quasiment tombé aux oubliettes. Mais deux habitants de l’île ont ressorti cette histoire du passé grâce notamment à la collaboration d’un témoin de l’accident, son ami Chantal-Henri Thiebaut. Récit.
Le 27 octobre 1979, au cours d’un incendie qui ravage une partie de l’île et qui commence à menacer des habitations, Daniel Diemert meurt accidentellement. Le gendarme, né le 25 janvier 1949 à Bischeim (Bas-Rhin), a alors 30 ans. Il est adjoint au chef de brigade, papa d’une fillette, Nadège, âgée de 6 ans. Il est en poste à l’île des Pins depuis 1978. Chantal-Henri Thiebaut, gendarme aujourd’hui en retraite à Tahiti, est le seul témoin de l’accident qui a coûté la vie à son ami qu’il nomme Dédé. Il a tenu à témoigner.
Ornières. « Depuis plusieurs jours le plateau est en feu, plus de 1 000 hectares sont partis en fumée et le feu se propage en direction des premières habitations. Nous avons sollicité les habitants pour qu’ils viennent nous assister dans la lutte contre cet incendie qui risquait de devenir dangereux pour les résidents. Malheureusement nous n’avons pas eu de succès dans notre démarche. Nous nous sommes donc reportés vers les militaires du centre familial interarmées (CFI) géré par le 42e BCS où nous avons reçu l’aide souhaitée. Les militaires de ce bataillon de soutien disposaient d’un camion-citerne de bonne capacité et nous l’ont mis à disposition avec un chauffeur. Nous avons effectué plusieurs rotations avec succès, l’incendie n’était pas encore sous contrôle, mais bien atténué.
« Le camion-citerne avait beaucoup de mal à atteindre le plateau en raison du mauvais état de la piste (ravines et ornières). Son chauffeur conduisait prudemment, je me trouvais derrière le camion, en Land Rover, avec Joachim Lémé, l’auxiliaire. Le camion a évité une ravine, mais sous l’action de l’eau dans la citerne, l’arrière du véhicule a glissé dans celle-ci et a basculé sur son flanc droit et est tombé dans le ravin. Dédé occupait la place de passager.
« Des dires du chauffeur, lorsque le camion a commencé à glisser, Dédé a tenté de sauter mais s’est retrouvé coincé sous l’avant de la cabine. Etant juste derrière, Joachim et moi nous sommes immédiatement précipités, le chauffeur était indemne et totalement affolé, il ne cessait de dire, “j’ai tué Monsieur Diemert”.
« Lorsque j’ai atteint le corps de Dédé, j’ai constaté qu’il avait le thorax complètement coincé sous l’avant de la cabine, il ne respirait plus, je n’ai pas senti son pouls. Malgré les efforts effectués, nous n’avons pas pu dégager le corps. Joachim que j’avais envoyé pour ramener sur les lieux la sœur Marie Aymard, la seule infirmière de l’île, est revenu avec elle. Elle a confirmé le décès de Dédé. C’est alors que nous avons basculé la citerne dans le ravin pour dégager le corps de mon ami. »
Rapatrié. Le corps de Daniel sera ramené à la gendarmerie dans la voiture de Chantal-Henri et un hélicoptère transférera son corps à Nouméa. Il sera déposé provisoirement dans le caveau de l’armée à Nouméa puis, en décembre 1979, il sera rapatrié sur la Métropole, à Vendenheim, en Alsace, où il repose désormais.
Son nom figure sur la stèle de la caserne Meunier à Nouméa, parmi la liste des gendarmes morts en service. « Lors de son décès, le groupement de Nouvelle-Calédonie était commandé par le colonel Mitchel qui, par la suite, a été affecté comme commandant de l’école de gendarmerie de Montluçon (Allier). En 1986, ce dernier a fait baptiser une sortie de stage “promotion Diemert” », conclut son ami.
Deux hommes, deux hommages
C’est en discutant avec ses voisins, Albert et Cléo, que Yann Le Goff, gendarme à Kunié depuis 2009, est parti sur la trace de Daniel Diemert. « Ils m’ont parlé du décès d’un gendarme au cours d’un incendie, sans savoir trop l’année. Et au niveau des archives de la brigade, je n’ai rien trouvé », explique-t-il. Il questionne alors des Kunié qui lui parlent de Daniel Diemert. Sur l’île, il n’existe aucune trace écrite du passage de Daniel ou de la tragédie. « J’ai alors contacté l’association In Mémoriam de Nouméa, qui a l’habitude de fouiller les archives, et elle a retrouvé un article des Nouvelles calédoniennes datant du 29 octobre 1979 », poursuit-il. Conscient que l’histoire reste douloureuse, le gendarme souhaite néanmoins que « le nom de Daniel Diemert soit noté quelque part, pour donner une âme à la brigade et pourquoi pas la baptiser à son nom ». Ayant pris contact avec l’association des retraités de la gendarmerie de Nouvelle-Calédonie, une plaque commémorative sera posée le 28 octobre à la brigade, au pied du mât aux couleurs. Pour ce qui est du nom de la brigade, le dossier est étudié à la direction générale de la gendarmerie. De son côté, Joseph Tikouré, maire de la commune de 1976 à 1982, a rencontré la maire, Sarah Vendégou, pour lui proposer de donner le nom de Daniel au chemin menant sur le plateau.