Deux gendarmes mobiles mis en examen pour violences sur deux jeunes
- Clicanoo.re
- publié le 27 août 2014
- 05h50
Deux militaires de l’escadron mobile de Satory -et bientôt un troisième- sont mis en examen par un juge saisi de la plainte de deux jeunes Bénédictins les accusant de violences volontaires en janvier 2013. À l’époque, le parquet avait classé l’affaire sans suite.
SAINT-BENOÎT
Les constatations médicales et la version des gendarmes avaient conduit le parquet à classer l’affaire. Mais la ténacité des plaignants et de leurs avocats a entraîné la réouverture du dossier.
Les faits remontent au mois de janvier 2013. Ce soir-là, des gendarmes mobiles de l’escadron de Satory (Yvelines) fêtent la fin de leur séjour réunionnais dans un restaurant de Saint-Benoît. Deux jeunes Bénédictins de 17 et 19 ans passent dans les parages. Deux versions s’opposent alors : selon les gendarmes, un bruit suspect et la fuite des deux jeunes ont attiré leur attention, motivant trois d’entre eux à procéder à l’interpellation des deux suspects, qui auraient résisté.
Les jeunes gens évoquent pour leur part une arrestation arbitraire et des violences gratuites et de la part des gendarmes, alors qu’ils rentraient tranquillement chez eux après être allés acheter un soda. Selon eux, les militaires leur ont non seulement porté des coups mais les ont également humiliés en s’asseyant sur eux dans l’estafette lors de leur transfert à la caserne Beaulieu. Les deux plaignants présentent alors des certificats médicaux attestant de cinq jours d’ITT pour le mineur, et trois pour le majeur.
L’affaire est prise au sérieux par le parquet, qui mandate un médecin légiste pour réexaminer les blessures des victimes. Ses conclusions sont moins catégoriques : les ITT sont revues à la baisse. Surtout, les blessures ne témoigneraient pas d’un passage à tabac tel que celui invoqué par les plaignants.
En juillet 2013, le parquet finit par retenir la version des gendarmes et classe l’affaire. Les militaires ont assuré avoir vu une canette atterrir sur un véhicule et deux jeunes prendre la fuite. Les blessures seraient intervenues postérieurement à l’interpellation, au moment de l’extraction des jeunes de l’estafette de gendarmerie sur le parking de la caserne.
FAUTE DES GENDARMES OU RÉBELLION DES PLAIGNANTS ?
Mais les plaignants n’en démordent pas. « Vu les blessures de mon client, à l’avant et à l’arrière du crâne, il est clair qu’il y a eu une faute qui doit être reconnue et indemnisée », soutient Me Nicolas Normand, l’avocat du plaignant mineur. « Sans compter que les raisons et les conditions de cette arrestation sont loin d’être éclaircies ». En effet, les deux jeunes n’ont fait l’objet d’aucune garde à vue ou poursuites. Leur alcoolémie était négative, et les faits de dégradations n’ont pu être démontrés.
Aussi, une plainte avec constitution de partie civile pour « violences volontaires par personnes dépositaires de l’autorité publique » est déposée par les deux Bénédictins auprès de la doyenne des juges d’instruction, qui confie le dossier à la juge Michèle Guillo. Et celle-ci ne semble pas faire la même lecture du dossier que le parquet en son temps. Au point que deux des trois gendarmes visés par la plainte ont été mis en examen au cours des dernières semaines, rapporte Le Quotidien dans son édition d’hier.
Le magistrat instructeur s’est en effet déplacé à Paris pour entendre les militaires et leur signifier que des indices graves pesaient à leur encontre, justifiant une mise en examen. Le troisième militaire visé devrait connaître le même sort prochainement.
Des mesures qui pourraient faire l’objet de recours prochains devant la chambre de l’instruction. L’avocat des trois gendarmes, Me Laurent-Franck Lienard, considère en effet que « le dossier est plus que léger » et que ses clients se sont déjà largement expliqués devant le magistrat. « Les gendarmes ont fait usage des moyens de contrainte normaux en cas de résistance d’un suspect », assure Me Liénard.
L’affaire n’a donné lieu à aucune sanction administrative de la gendarmerie, qui suit l’évolution du dossier. « La hiérarchie est informée de cette procédure, mais il s’agit d’un dossier propre, dans lequel il n’y a pas lieu à prononcer de suspension », précise l’avocat des gendarmes, qui sont toujours en poste dans leur escadron.
Sébastien Gignoux