Dans un délire suicidaire, il menace et outrage les gendarmes, à Saint-Martin-de-l’If
Saint-Martin-de-l’If. Quatre mois de prison assortis d’un sursis probatoire pour un homme de 35 ans, fragile, qui espérait se faire tuer par les gendarmes.
PUBLIÉ LE 30/09/2020 À 07:49 MIS À JOUR LE 30/09/2020 À 07:49
« Il a demandé, ce jour-là, à plusieurs reprises que les gendarmes lui mettent une balle. Il n’a même pas eu peur quand on l’a mis en joue. Il attendait simplement que la menace soit mise à exécution», détaille Me Philippe pour la défense d’un homme de 35 ans que les gendarmes ont eu beaucoup de mal à interpeller le 10 mai 2020, à la veille du déconfinement. Le prévenu, jugé vendredi 25 septembre 2020 par le tribunal correctionnel de Rouen, a été condamné pour dégradations, violences, outrages et menaces à quatre mois de prison intégralement assortis d’un sursis probatoire, histoire qu’il subisse des soins pendant dix-huit mois.
Il se taillade
L’affaire commence le 10 mai 2020, à 13 h, à Saint-Martin-de-l’If, quand le prévenu lui-même, salarié d’une grosse entreprise, téléphone aux secours. Il vient de frapper son épouse. Elle a perdu connaissance. Les sapeurs-pompiers sont accueillis par le prévenu. Il boit du whisky, leur dit de «dégager» et agite un couteau avec la menace «de les planter». Si les pompiers parviennent à mettre une petite fille et l’épouse en sécurité, ils appellent aussi les gendarmes tandis que le prévenu se retranche chez lui et boit du whisky, encore.
Les militaires essaient d’approcher l’homme, qui les menace, les insulte et même lance des couteaux dans leur direction. Le trentenaire est mis en joue, réclame qu’on «lui mette une balle» pour en finir. Il prend même un couteau et casse la vitre d’un fourgon de gendarmerie avec. Dans un état d’hystérie, cet homme par ailleurs honorablement connu, doux, respectueux et serviable selon ses proches, bien inséré, mais qui a souffert récemment d’un burn-out, se taillade le torse et les avant-bras, se montre tout saignant devant les gendarmes qui le mettent en joue.
« Impossible de discuter avec lui »
Il met aussi un de ses couteaux sous sa propre gorge et menace d’en finir. «C’était impossible de discuter avec lui», se souviennent les militaires qui appellent des effectifs en renforts. Le peloton de surveillance et d’intervention vient à la rescousse, la scène dure des heures et finalement c’est le négociateur de cette unité qui parvient à convaincre le prévenu de se rendre sans violence. En sortant, l’homme se penche sur l’épaule du militaire et se met à pleurer. Aussitôt après, il est placé en hôpital psychiatrique, son état étant incompatible avec une garde à vue. Un psychiatre écrit que l’homme a souffert d’une « crise suicidaire aiguë ».
«Je reconnais les faits mais malheureusement je ne m’en souviens pas complètement», détaille-t-il devant les magistrats. Il explique avoir paniqué après avoir frappé son épouse, avoir «eu peur des conséquences. Je ne sais pas pourquoi j’ai agi comme ça. Les couteaux, je les ai lancés mais sans viser. Je suis myope et je n’avais pas mes lunettes.» Reste qu’une des lames a failli atteindre un gendarme qui n’a dû son intégrité qu’au réflexe d’un collègue qui l’a poussé.
« Un état d’hystérie total »
«Ce sont des pompiers volontaires qui sont intervenus, explique l’avocat du service d’incendie et de secours. Ils se sont retrouvés menacés de mort. C’est inacceptable, mais il était dans un état d’hystérie total et il est particulièrement charmant normalement.» Si les pompiers réclament chacun l’euro symbolique et l’obtiennent, leur service obtient 200 € pour cette atteinte à l’uniforme.
Ne sachant si l’altération du discernement signalé par le psychiatre est due à une maladie mentale (circonstance atténuante) ou à l’alcool (circonstance aggravante), le ministère public requiert une peine de trois à dix mois de prison assortie d’un sursis probatoire. «C’est tout récemment qu’un diagnostic de bipolarité a été posé, mon client ne se savait pas malade lors des faits», souligne Me Philippe, qui réclame et obtient la clémence. Chacun des sept gendarmes concernés a obtenu 600 € de dommages et intérêts.