Ascou-Pailhères: hommage aux trois gendarmes du PGHM ensevelis le 7 mai 1974 sous une avalanche
Comme tout bon ariégeois, Daniel aime la montagne, le ski et la randonnée.
Aussi après ses classes, quatre mois à Saint Astier (Dordogne), c’est avec fierté qu’il gagne les rangs de l’unité de montagne de gendarmerie de Savignac les Ormeaux (à l’époque PGHM pour peloton de gendarmerie de montagne) le 31 janvier 1974. Il est âgé de 23 ans (parmi les sursitaires qui font leur service, il est un des plus âgés).
À l’époque l’encadrement est assuré par François Pourré sous les ordres du capitaine Jacques Boisgarnier.
«On assurait les secours sur les pistes de ski, se souvient Daniel. N’ayant jamais fait d’exercice sur névé, on décide début mai d’aller s’entrainer au Tarbesou en crampons et piolet. Ce jour-là le temps était exécrable, il faisait froid, il y avait du brouillard.
Si bien que l’on décide d’aller se réchauffer au refuge, en attendant une éclaircie. Nous étions dix sur cet exercice, on se divise en deux groupes.
Le premier passe par le lieu dit la congère de Font Néré, le second escalade par un petit vallon et passer par derrière. Je décide dans un premier temps de partir avec le premier groupe puis reviens sur mes pas pour rejoindre le second. Peu de temps après notre arrivée au refuge, le ciel se dégage enfin.
En même temps que cette fugace éclaircie, on entend un sinistre craquement. Il était exactement 10 h 10. Sur le pas de la porte, on a vu glisser une plaque de neige, on a tout de suite compris que nos camarades étaient dessous. Arrivé sur les lieux, je me souviendrai toujours de cette main avec un gant noir qui dépassait de l’amoncellement de neige.
C’était celle de l’adjudant Raymond Fauvet. On l’a vite sorti de là. Nous sommes remontés à toutes jambes chercher des pelles, rejoindre le camion pour téléphoner à la première maison et prévenir le PGM, l’hélicoptère stationné à l’époque à Toulouse, rapatrier de St Girons le maitre chien, alerter les secours (douaniers, pompiers, gendarmerie d’Ax).
Nous avons creusé comme des forcenés pour tenter de sauver nos copains. Deux heures plus tard, le miracle a opéré, nous avons d’abord sorti René Aymard, puis Jean-François Croses.
Il s’en est sorti, car il avait poussé la neige autour de la tête créant ainsi une poche d’air. Mais Philippe Lesauvage qui était appelé comme nous a eu moins de chance et les deux gendarmes d’active venus s’entrainer sur cet exercice, Luc Bordenave et Gilbert Peyraud, ont été ensevelis par cette avalanche».
Plus de quarante ans après cette catastrophe épouvantable, l’avalanche habite encore les nuits de Daniel qui ne peut l’évoquer sans émotion.
Son service militaire terminé, Daniel quitte l’armée le 30 octobre 1974 et rejoint la vie civile: «j’avais un BTS, j’aurais pu devenir officier et rentrer dans l’armée, mais cet évènement a véritablement marqué ma vie d’adulte».
Aujourd’hui jeune retraité installé à Pamiers, il s’emploie depuis quelque temps avec son ami Jean-François Crozes à retrouver les anciens gendarmes auxiliaires et l’encadrement de sa classe 74: «nous sommes quinze et nous avons voulu sceller cette amitié, rendre hommage à ceux qui ne sont plus là en installant une plaque commémorative à l’emplacement de la tragédie.
Elle sera officiellement inaugurée jeudi 7 mai 2015 à 14 h 30 en présence de Nathalie Marthien préfet de l’Ariège et le général Boisgarnier aujourd’hui à la retraite».
Nous l’avons retrouve ce mardi à quelques encablures du col de Pailhères dans le froid et le brouillard, comme en ce jour du 7 mai 1974. Les souvenirs sont remontés en même temps que les larmes retenues.
«Il faut imaginer une congère de 2,5 m de haut et 8 mètres de neige qui dévalent dans une auge en contre bas, ils n’avaient aucune chance.
J’aurais pu faire partie du lot». Restés très soudés depuis, les anciens du PGHM sont heureux de se retrouver jeudi autour de cette stèle: «nous avons vécu quelque chose de fort, nous devons à présent entretenir ce devoir de souvenir et de mémoire».