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Le - Les « papys braqueurs » qui avaient tiré sur les gendarmes condamnés

Seine-et-Marne. Les « papys braqueurs » qui avaient tiré sur les gendarmes condamnés

Larbi D. et Vincent S., âgés de 60 et 55 ans, ont été condamnés par la cour d’assises de Seine-et-Marne pour des faits remontant à avril 2017. Ils avaient tiré sur les gendarmes.

Ce jeudi 14 octobre 2021, gendarmerie et police ont mené une opération de contrôles au centre-ville de Pontivy (Morbihan).
L’un des braqueurs avait ouvert le feu sur les gendarmes à Mortcerf (©DR)

Par Rédaction Melun

Publié le 30 Oct 21 à 15:04 

La République de Seine et Marne

Les accusés qui comparaissent libres devant la cour d’assises de Seine-et-Marne le mardi 26 octobre 2021, sont d’un genre très particulier ; en tout cas, d’un style plutôt rare dans ce genre d’affaire de braquage de camion avec tirs d’armes à feu sur les gendarmes.

Avec Vincent S. et Larbi D., on est très loin des furieux desperados habituels. Leur âge d’abord, 60 ans pour Larbi et 55 ans pour Vincent.

Leur style aussi, car ils sont vêtus soigneusement et avec élégance et s’expriment avec une certaine distinction. Leur parcours enfin. Le premier est négociant en vin quand le second est la fois logisticien, rénovateur d’appartement, se passionne pour la lecture des grandes œuvres classiques et à ce titre cultive une belle bibliothèque de plusieurs centaines d’ouvrages. « Quand on veut me faire plaisir, on m’offre un livre », plastronne-t-il devant les jurés.

Un camion rempli de dosettes Nespresso

Tout ce petit monde fréquente une « bonne société » qui chez l’un achète quelques bons crus charentais, tandis que l’autre (Vincent) restaure de beaux appartements et assure (via un réseau tortueux de sociétés qu’il a montées) une partie de la logistique de la société du Tour de France. N’a-t-il pas aussi été le gendre du plus grand flic de France en la personne du directeur central des Renseignements généraux (lire encadré) ?

C’est sur cette base originale que s’est ouvert un procès qui durant quatre jours (du 26 au 29 octobre) a dû répondre à l’épineuse question : les deux accusés sont-ils oui ou non les deux papys braqueurs qui, le 14 avril 2017, ont attaqué un camion transportant des machines à café et des dosettes Nespresso (un chargement de 160 000€) dans la zone d’activités d’Alfortville (94), avant d’échanger des coups de feu avec les gendarmes derrière la gare de Mortcerf tandis qu’ils déchargeaient le fameux camion ?

Le rythme lent des débats menés avec application par le président de la cour ne va s’épargner aucun retour en arrière sur le passé des protagonistes, ni aucune algarade avec l’avocat de Vincent. On sent que ces deux-là ont du mal à se supporter. Les accusés baissent la tête, sentant que ce ton n’est pas bon pour eux.

Vincent et Larbi nient les faits. La minutieuse enquête menée durant plusieurs mois a pourtant permis de les confondre à l’aide d’écoutes téléphoniques, de repérages minutieux de leurs bornages téléphoniques ainsi que de quadrillages de leurs activités respectives sans parler des invraisemblances de leurs explications censées leur servir d’alibis. Chaque accusé a en effet un passé lourd de truands chevronnés (qui leur ont valu de longues années à l’ombre) au cours de leurs jeunesses turbulentes.

Alors les faits justement : ils sont racontés en détail par le chauffeur du camion qui témoigne longuement à la barre (malgré une blessure persistante à la cheville héritée de l’agression). Il est 6h ce matin du 14 avril 2017 lorsque son camion est immobilisé par un véhicule au sortir du dépôt.

« L’attaque de la diligence » se déroule sans trop de bobos, le chauffeur n’opposant aucune résistance au marteau que brandit un malfaiteur pour seule arme. Il sera déposé Pont de Charenton ; les braqueurs au nombre de trois, continuent leur chemin à bord du poids lourd et de la voiture interceptrice (volée et maquillée). « Ils avaient l’air surpris en découvrant la nature du chargement », explique le chauffeur : « C’est pas grave, on boira du café » aurait alors lancé l’un d’eux.

Caché derrière un frigo

Ce que les truands ignorent, c’est que le camion est muni d’un tracker que leurs trois brouilleurs n’arriveront pas à neutraliser. Ce qui permet aux gendarmes de le localiser à Mortcerf, dans un entrepôt, derrière la gare. Une patrouille de deux hommes est envoyée sur place. A leur arrivée les gendarmes voient les trois hommes en train de décharger. Ils tentent de les interpeller, mais l’un des braqueurs sort son arme et ouvre le feu. Les gendarmes ne répliquent pas. Finalement les trois malfaiteurs prennent la fuite.

Deux mois après l’attaque, une tentative d’arrestation est lancée sur Vincent : quatre-vingts enquêteurs à bord d’une vingtaine de véhicules déboulent dans le jardin de son pavillon à Santeny. Vincent réussit à se cacher derrière un frigo : « Une planque que j’avais découverte en jouant à cache-cache avec mes enfants » présente-t-il à la cour.

Il y restera trois heures le temps que les gendarmes repartent bredouille. « Ce jour-là, j’ai fait une grosse connerie, poursuit Vincent, j’aurais dû me rendre ». Il sera finalement interpellé ainsi que Larbi dont on retrouve notamment les traces ADN dans la voiture du braquage, en avril 2018.

A la barre des témoins, l’un des deux gendarmes qui s’est porté partie civile, n’a pas oublié le canon de l’arme pointée à un mètre de son visage : « J’ai eu le temps de frapper son bras avec ma matraque télescopique et j’ai couru. Il nous a tirés dessus deux fois atteignant notre véhicule ».

A l’heure des réquisitions, l’avocate générale, sur un argumentaire parfaitement détaillé des très nombreuses contradictions des scénarios des deux accusés, réclamera 8 ans de réclusion contre Vincent pour l’attaque à main armée et 15 ans contre Larbi pour tentative de meurtre d’un des gendarmes.

Au terme d’un long délibéré, les deux accusés ont finalement été condamnés : 10 ans de prison pour Larbi et 7 ans pour son acolyte, Vincent. Ce dernier a déjà fait appel de sa condamnation. Pour le premier, sa décision n’était pas encore officielle au moment de la diffusion de cet article.

JFC

Source : actu.fr

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