Quand la téléconsultation se généralise aussi chez les militaires
auteur : Pablo Agnan – publié le 9 avril 2020
Pour continuer à soigner dans la durée, la direction de la médecine des forces (DMF) du service de santé des armées (SSA) a mis au point, avec l’aide des gendarmes de l’école de Rochefort, un système pour effectuer des téléconsultations. Une solution qui rencontre un franc succès.
La téléconsultation n’était, jusqu’à ce mois de mars 2020, pas une pratique très répandue chez les praticiens civils et peu exploitée au sein du service de santé des armées (SSA). Dans ce contexte de crise sanitaire et des mesures de confinement qui s’en sont suivies, la direction de la médecine des forces du SSA a accéléré le développement d’un service de téléconsultation.
La médecin Élodie, médecin responsable de la 112ème antenne médicale – ROCHEFORT, a dû mettre en isolement ses patients possiblement atteint du Covid-19. Une pratique normale pour éviter la dissémination de la maladie. Mais face à la quarantaine, les médecins des forces se sont retrouvés face à une problématique ; celle de ne pas pouvoir noter les consultations, car les dossiers médicaux des personnels sont dématérialisés. Impossible pour eux donc d’avoir accès à distance à la plateforme Axone, une base de données médicales protégée, pour enregistrer des éléments médicaux nouveaux, comme ils le feraient sur une consultation classique.
A cause du risque de perte d’informations importantes, la médecin Élodie a cherché une solution pouvoir accéder à distance à la plateforme Axone du SSA. Et c’est auprès du commandant de l’école qu’elle l’a trouvée.
Adaptation dans l’urgence
« C’est pour aborder cette problématique que la médecin Élodie est venue vers nous », raconte le général de brigade Dominique Chappot de La Chanonie, commandant de l’école de gendarmerie de Rochefort. « Dans ce contexte de crise généralisée, il importait de s’organiser afin de permettre aux médecins des antennes de Rochefort de continuer à apporter à la gendarmerie tout le soutien du SSA au profit de la gendarmerie et de ses familles ».
Après quelques instants de remue-méninge, la Colonelle Christine Tébar, chef de la division de l’appui à la formation de l’école, trouve la solution : « plutôt que de se lancer dans des études techniques compliquées, pourquoi ne pas utiliser les moyens du bord : Néogend ? », propose-t-elle.
Depuis plus de deux ans, la gendarmerie s’est massivement dotée de Néogend, un environnement logiciel « nomade » qui permet aux gendarmes de terrain d’accéder, d’où ils se trouvent, aux logiciels métier ainsi qu’à toutes les informations utiles à l’exercice de leurs missions, à partir d’un smartphone ou d’une tablette dédiés », commence à expliquer le général Chappot de La Chanonie, avant de laisser la parole au médecin Élodie.
« L’adjudant Christophe Berny, chef du détachement des systèmes d'information et de communication (SIC) de l’école m’a alors munie d’une tablette Néogend, depuis laquelle j’ai pu de suite me connecter à Axone via l’intranet gendarmerie puis l’Intradef, sans paramétrage supplémentaire ! ».
Le commandant de l’école a dans la foulée mis deux Néogend à la disposition des deux médecins de l’antenne.
La téléconsultation, un fil d’Arianne
Avec ces dispositifs, il ne manquait plus qu’un moyen de communication. Le praticien présente alors son projet de téléconsultation au Colonel Bruno Makary, commandant du Groupement de gendarmerie de Charente-Maritime (GGD17). Il adhère immédiatement au projet et lui obtient le prêt de smartphones pour les téléconsultations et d’un complément de Néogend. « En 4 jours, le système était en place et nous avons pu effectuer les premières téléconsultations », sourit l’officier du SSA.
Une solution qui séduit et surtout, semble rassurer les patients. En moins d’une semaine, l’équipe des 3 médecins du 13ème centre médical des armées a effectué près de 50 téléconsultations, à raison d’une demi-heure par personne. « Grâce au bouche-à-oreille, l’information a circulé et le recours à ce service est en augmentation », constate la médecin Élodie. Ce service a été ouvert 7 jours sur 7 dès la première semaine.
Une méthode qui chamboule la pratique des docteurs. « Ce n’est pas quelque chose d’habituel », confie la praticienne. « Les paramètres pour établir un diagnostic sont plus longs. On pose plus de questions, on fait faire quelques exercices au patient ». Les ordonnances et les arrêts de travail sont, quant à eux, envoyés par e-mail. Si ce système « ne remplace pas un examen physique », il constitue, face au Covid-19, « la solution la plus adaptée pour continuer à consulter. »
Si dans le monde civil, face aux besoins de santé de la population, la téléconsultation s’est massivement développée, ce besoin ne revêtait pas la même intensité pour les militaires, du moins sur le territoire national. Pourtant, les armées sont déjà familiarisées avec la télémédecine, comme l’explique le général Dominique Deschamps, conseiller technique santé du directeur général de la gendarmerie nationale : « Il existe des solutions qui sont initialement dédiées aux opérations extérieures (OPEX) et aux bâtiments de la Marine nationale. Il s’agit de pouvoir fournir des avis spécialisés sur des cas particuliers, qui sont loin de tout ».