Le hérisson, « repas traditionnel » des Gens du voyage
L’animal est parfois chassé puis consommé par cette communauté dont il est un plat traditionnel. Une « viande assez forte, un peu comme du faisan », selon les témoignages que nous avons recueillis.
Par Florian Loisy (@florianloisy sur Twitter)Le 6 novembre 2017 à 17h27
Pour les membres de la communauté des Gens du voyage, la saisie de 13 hérissons vivants faite par les policiers la semaine dernière n’est pas surprenante. Jeune trentenaire installé dans une ville bordant la N 20 en Essonne, Ben, issue de cette communauté, précise que « le hérisson est l’insigne des gitans car c’était le repas traditionnel, festif, des anciens. »
Comme les autres, il n’ignore pas la loi. « On sait tous que c’est une espèce protégée maintenant, donc les gens ne les chassent plus trop, affirme-t-il. Ça se perd. On préfère attraper un sanglier. Mais ça arrive quand même encore parfois de manger du hérisson.
Lui aussi en a goûté, même s’il n’aime pas trop la chair du petit animal. « C’est une viande assez forte, un peu comme du faisan, indique-t-il. Il y a davantage à manger dessus que ce qu’on peut croire. Et puis c’est accompagné de pommes de terre. » Il existe plusieurs façons de cuisiner l’animal. Sur la braise au barbecue, mais aussi à l’étouffée. « On le met dans de l’aluminium, enfoui sous la terre et on fait un feu par-dessus, détaille ce père de famille. Certains mettent un peu d’ail, du beurre ou de l’huile. »
« Ça montre qu’on est capable de se débrouiller, qu’on est différent »
Les racines manouches, tziganes ou gitanes semblent associées à cet animal. « C’est un plat typique, car c’est le repas du pauvre, rappelle à nouveau Ben. Dans notre culture, il y a ces soirées partagées entre familles, devant le feu. Ceux qui ont plus de 50 ans faisaient la fête autour d’un plat de hérissons, qui est un animal proche du rat. Donc aujourd’hui encore, manger quelque chose qu’on a pris nous-même, ça montre qu’on est capable de se débrouiller, qu’on est différent. On aime prendre ce qui se trouve dans la nature.
Malgré tout, Ben n’a jamais traqué le hérisson. Mais un autre membre de la communauté des gens du voyage installé à Longpont-sur-Orge raconte que « les anciens dressaient leurs chiens à cette chasse ». « D’autres font des pièges qu’ils déposent à la tombée de la nuit, relate-t-il. Un peu comme des nasses, en coupant une bouteille et en inversant le goulot. A l’intérieur on peut mettre des restes de viande, des croquettes de chiens ou de chat. »
Mais il tient à relativiser. « Prendre un hérisson ou deux, c’est parfois pour les jeunes un moyen de se rapprocher de leurs racines, un jeu, admet ce gitan sédentarisé. Mais ce n’est pas ce genre de chose qui va entraîner l’extermination de l’espèce. »