Un an ferme pour avoir pulvérisé le portail de brigade de
gendarmerie à Saint-Cyprien
Le 10 janvier à 10h41 | Mis à jour le 10 janvier
La semaine dernière, l’homme était venu dans la nuit « récupérer » son fils, dit-il, qui était en garde à vue.
« Je suis allé chercher mon fils comme on va chercher un enfant à l’école ». Maladresse que celle de cet homme jugé hier en comparution immédiate devant le tribunal correctionnel de Perpignan pour avoir foncé dans le portail de la brigade de gendarmerie de Saint-Cyprien et s’être donc introduit de manière illégale sur un terrain de la défense nationale dans la nuit de jeudi à vendredi. Quelques heures plus tôt, son fils de 16 ans avait été placé en garde à vue dans le cadre d’une affaire de proxénétisme aggravé. Il lui serait reproché d’avoir contraint une adolescente de 14 ans à monnayer ses faveurs sexuelles. Le jeune garçon est entendu, tandis qu’à la maison, la mère pleure, se lamente. Le père, auto entrepreneur dans le jardinage, commence à se saouler et, dans la nuit, opte pour le pire des choix. Vers 1 heure, il prend le volant de son fourgon, avec un taux de 1,76 g/l d’alcool dans le sang, arrive au niveau de la brigade, fait deux tours de rond-point et explose littéralement le portail qui vole à près de 8 m de ses gonds. L’homme s’arrête à quelques mètres de l’entrée, prend la fuite à pied avant d’être rapidement intercepté, mais il menace encore deux militaires. « Si vous ne libérez pas mon fils immédiatement, je reviendrai avec un couteau et je m’occuperai de vous…». «Je ne me souviens pas avoir dit ça, s’explique le prévenu au casier judiciaire vierge. J’ai agi sans réfléchir. J’ai eu peur que l’on me tire dessus. Ce n’est pas un bon exemple pour les enfants. Je m’excuse auprès des gendarmes d’avoir fait un truc débile comme ça. Et ça, on ne le fait qu’une fois dans sa vie. Mais, je n’avais l’intention de faire du mal à personne ». Or, dans le contexte actuel de menace terroriste, les forces de l’ordre ignoraient à qui elles avaient affaire et ont heureusement fait preuve d’un grand sang-froid. « J’ai entendu un bruit métallique. J’ai dit à mon collègue : «Mais qu’est ce que tu as fait tomber ?» Il m’a répondu : «Rien». Et là, on se retrouve avec un fourgon, tous phares allumés devant l’entrée de la brigade. On se demande combien ils sont à l’intérieur, s’il y a des bonbonnes de gaz, des explosifs ? Alors, on se retranche, on appelle les renforts, mais on garde l’individu en visuel. Voyant qu’il s’échappe, on reste à distance, puis on l’arrête. Mais jusque-là, on ne savait pas s’il était armé. Cela aurait pu mal tourner…», racontent avec calme les deux gendarmes qui n’ont pas souhaité se constituer partie civile, mais qui ont tenu à être présents à l’audience, soutenus par plusieurs gradés dont le commandant de groupement des P.-O. Nos familles vivent là. Le lendemain, les gamins sont passés devant ce spectacle et c’est quand même un traumatisme. Ils se demandaient si on était vraiment en sécurité ». « Oui, on a évité le drame. Heureusement que les enfants de gendarmes sont bien élevés et ne font pas du vélo à 1 heure du matin dans la cour, renchérit la procureure. Nous ne pouvons pas oublier l’état d’urgence, les pressions sur les forces de l’ordre ». Et de requérir face à « une réaction inconsciente et inacceptable », une « peine exemplaire » d’un an ferme, ou l’alternative d’un sursis avec mise à l’épreuve. Alors Me Bayekola, l’avocat de la défense, s’accroche à cette seconde option. « Je ne voudrais pas que ce dossier prenne une ampleur qu’il n’a pas. C’est un acte isolé, dit-il. Ramenez la sanction à de plus justes proportions ». Le tribunal est pourtant allé au-delà des réquisitions et l’a condamné à 2 ans de prison dont 1 avec sursis et mise à l’épreuve pendant 2 ans dont l’obligation de travailler, de réparer les dommages (6 319 euros à verser à la communauté de communes Sud Roussillon pour le portail), l’interdiction de paraître dans les P.-O. Outre, la suspension de son permis pendant 7 mois et la confiscation du véhicule. À l’issue, l’homme a été conduit directement en prison. Laure Moysset