Radars – Tous ensemble contre les gendarmes
Les membres du collectif aveyronnais Facebook anti-radars ont été relaxés par la cour d’appel de Montpellier. Bonne nouvelle pour les automobilistes parait-il. Faut voir…
Sur leur page, ils donnaient les emplacements de radars mobiles, signalaient les contrôles d’alcoolémie et se revendiquaient comme « le seul groupe utile sur Facebook ». Cela n’avait pas plu au procureur de la république de Rodez qui a décidé de les poursuivre en justice et les a fait condamner fin 2014.
« Le groupe qui te dit où est la police en Aveyron » vient d’être relaxé en appel, le tribunal estimant que « le code de la route ne prohibe pas le fait d’avertir ou d’informer de la localisation d’appareils, instruments ou systèmes servant à la constatation des infractions à la législation ou à la réglementation de la circulation routière. «
Je suis content pour eux, ça m’aurait navré que l’on punisse des gens qui ne font que pratiquer artisanalement et bénévolement le business de Coyote, Waze et consorts. Avec seulement un langage un peu moins châtié : ils ne signalaient pas d’hypocrites « zones de danger », mais « la maison poulaga », les « keufs », « bleus », « poulets », et sans doute avec bien moins d’efficacité que les susdites sociétés.
D’ailleurs, ces sociétés, les pouvoirs publics avaient envisagé de les interdire il n’y a pas si longtemps. Avant d’y renoncer : Coyote au nom de la sauvegarde de l’emploi et du savoir-faire français, Waze parce qu’autant vouloir censurer Facebook ou Twitter. On les a juste priés de changer de vocabulaire.
Si les alertes de « zone de danger » de Waze et Coyote sont légales, les « signalements » du groupe d’Aveyronnais – et de bien d’autres en France – ne pouvaient être illégaux. Mais ça ne doit pas nous empêcher de réfléchir à ce que représente le développement de ces nouveaux boucliers à gendarmes et aux parades qu’ils vont susciter de la part de ceux-ci. Faut-il que le bleu devienne invisible au bord de la route ?
Surtout, savons-nous bien ce que nous faisons ? Signaler un contrôle d’alcoolémie, c’est permettre à quelqu’un que l’on ne connaît pas de prendre le volant légèrement éméché ou pété comme un coing en lui offrant une totale impunité : personne n’a jamais croisé deux éthylomètres dans la même soirée. Signaler les radars, c’est permettre à n’importe qui de rouler avec 10 km/h de trop ou carrément pied dans la tôle. Celui qui appuie sur le bouton magique ne saura jamais qui profite de l’information ni ce qu’il en fera.
Qui se pose la question ? Personne : le gendarme c’est l’ennemi, le radar, c’est la pompe à fric, souffler dans le ballon, c’est pour les poivrots et les poivrots n’ont pas de smartphone. Alors, on s’entraide entre gens bien intentionnés. Le groupe Facebook de l’Aveyron comptait 3 000 membres…
Quelle autre explication à la remontée du nombre de tués ces deux dernières années ? Je ne vois pas d’autre raison que la démocratisation galopante de ce moyen d’échapper aux contrôles.
Nous trouvons normal de voir des militaires patrouiller dans les gares et aéroports, dans les rues et à la sortie des écoles, d’être fouillés à l’entrée d’un grand magasin ou d’un train, nous jugeons nécessaire d’étendre les prérogatives de la police et de la justice quitte à voir restreindre nos libertés. Et dans le même temps, il nous semble parfaitement normal et banal de rendre inopérant le travail des forces de l’ordre au bord de la route…