Plus de deux mois après les faits, Jérôme M. n’a toujours pas retrouvé la mémoire. Au tribunal correctionnel de Senlis, où il était jugé ce jeudi pour blessures involontaires, ce père de famille à la vie rangée n’a pas été en mesure d’expliquer comment il a pu, le 23 décembre au soir, faucher sans s’en rendre compte un gendarme en intervention sur la voie publique à Saint-Leu d’Esserent.
« J’étais fatigué et je me concentrais sur ma conduite. Je n’ai absolument pas vu, jure le prévenu, interpellé la nuit suivante à son domicile de Franconville (Val-d’Oise) avec un taux d’alcool supérieur au seuil autorisé. Je me souviens avoir fait un écart avant de continuer mon chemin. Ce n’est qu’une fois rentré chez moi que j’ai remarqué les dégâts sur l’utilitaire. »
Vers 20 heures, ce salarié de la SNCF de 43 ans avait quitté son lieu de travail, à Thiverny. C’est avec son véhicule de service siglé qu’il renverse peu après l’adjudant-chef Stéphane Bihet. Le commandant de la brigade de Cires-lès-Mello est sur place afin de sécuriser la zone où un accident vient de se produire : un jeune détenu en permission de la prison de Liancourt a percuté un lampadaire à l’entrée de la commune. La voiture volée qu’il conduisait en état d’ivresse a fini sur le toit.
« On était proche de Noël. On avait décidé le midi de se faire un repas entre collègues, explique Jérôme M. J’ai bu trois whiskys et du vin rouge. Vers 16-17 heures, on a mangé quelques huîtres avec un verre de blanc. Je me suis peut-être un peu laissé aller. » Le choc laisse le gendarme inconscient. Sérieusement touché, il se réveillera sur la route de l’hôpital. « Je ne portais pas de chasuble réfléchissante mais j’étais dans le périmètre de sécurité, c’est certain », assure le militaire, ce jeudi à l’audience. Toujours en arrêt après avoir passé 45 jours en fauteuil, il devrait bientôt pouvoir reprendre le travail.
« Il y avait des lumières et des gyrophares partout. Comment avez-vous pu ne rien voir et ne rien sentir ? » interroge le président du tribunal. « Si j’avais vu, je me serais arrêté », souffle le prévenu. Mais pour la procureur, le délit de fuite est « caractérisé ». « Soit vous étiez considérablement alcoolisé, soit vous nous mentez et n’assumez pas vos responsabilités ».