Refus d’aménagement de peine pour le meurtrier de notre père.
Affaire Bondonny : Alain Bodchon demande la conditionnelle, la famille Lac s’y oppose
Onze ans après les faits, on reparle du meurtre de Marius Lac : Alain Bodchon, l’assassin, demande à bénéficier de la liberté conditionnelle. Les filles de la victime s’y opposent et lancent une pétition.
Alain Bodchon demande sa libération conditionnelle. Il en a le droit, après avoir effectué la moitié de sa peine. Les assises de la Corrèze l’ont condamné en 2007 à 22 ans de réclusion pour le meurtre de Marius Lac, en 2004 à La Chapelle-Spinasse. Ancien gendarme, Marius Lac était le principal témoin du procès de l’empoisonneur des chiens d’Egletons, Roland Bondonny. C’est lui qui aurait commandité l’assassinat.
Mais cette demande de libération révulse les filles de Marius Lac. Elles ont lancé une pétition pour qu’Alain Bodchon reste en prison. Près de 2 000 personnes ont déjà signé.
Sujet : tr: affaire Bodchon / Lac Marius
Le 19 janvier 2015
Objet: Refus d’aménagement de peine pour le meurtrier de notre père.
Suite à l’affaire des chiens empoisonnés en haute Corrèze, en mai 2007 la cour d’Assises de Tulle a condamné M. Bodchon pour l’assassinat de M. Marius Lac (retraité de la gendarmerie) à la peine de 22 ans de réclusion criminelle.
Aujourd’hui, alors qu’il n’a effectué que 10 ans, il demande sa libération et ceci n’est pas acceptable. Nous entendons protester contre une telle demande. Une libération au bout de quelques années seulement d’exécution de la peine ne peut se justifier, l’affaire étant toujours dans les esprits à fortiori vu son contexte.
Nous demandons instamment à ce qu’il ne soit pas fait droit à la demande de M Bodchon.
Ceci est la pétition que nous avons rédigée et qui circule actuellement. Une première vague d’environ 2100 signatures a déjà été récoltée en à peine 20 jours et envoyée au Juge d’Application des Peines pour lui montrer que cela est inconcevable et pas uniquement pour nous… Depuis quelques jours elle est en ligne sur change.org sous le lien suivant : www.change.org
Nous avons besoin de votre aide et comptons sur votre soutien pour la faire connaître, la diffuser et la faire signer car nous avons besoin du plus grand nombre de signatures pour essayer de faire changer les choses. Nous vous en remercions à l’avance.
Nous avons également fait appel aux médias http://pluzz.francetv.fr à la Montagne le 13/01/2015 www.lamontagne.fr
Nous vous ferons connaître ultérieurement le nombre de signatures obtenues ainsi que le déroulement de cette affaire.
Veuillez agréer, Madame , l’expression de nos sentiments.
Les filles de Marius
Véronique CLAUX et Valérie LAC
Affaire des chiens empoisonnés d’Egletons : Alain Bodchon demande une mise en liberté
Archive – STAVEL Christian
Des démarches qui, effectuées par le détenu depuis le centre de détention d’Arras, dans le Pas-de-Calais, ont profondément ému les deux filles de la victime, qui vivent en Corrèze. Véronique Claux et Valérie Lac ont ainsi entrepris de mettre en place une pétition pour se dresser contre ce qu’elles considèrent être « une injustice ».
1.374 signatures
« J’ai été informée par mes anciennes clientes qui sont tombées des nues en apprenant que l’assassin de leur père voulait sortir de prison. Elles m’ont fait part de leur sentiment d’injustice et de leurs craintes », indique Me Martine Gout. Valérie Lac, qui explique avoir appris la nouvelle courant décembre par le Service pénitentiaire d’insertion et de probation, confirme, sous le coup : « C’est indécent. On a l’impression d’être deux fois victimes ». Et de s’inquiéter pour sa sécurité : « Cet homme a traversé deux fois la France pour finir par tuer mon père. J’habite actuellement sa maison. Je ne veux pas trembler en rentrant chaque soir en sachant qu’il est en liberté. »
En plus des 465 signatures que les deux sœurs indiquent avoir déjà récoltées dans les rues d’Égletons, Véronique Claux et Valérie Lac devraient transmettre prochainement 909 paraphes supplémentaires au tribunal d’application des peines. Le magistrat appréciera, avec notamment en regard les résultats de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté et expertise, avant de rendre sa décision d’ici quelques semaines.
Pour Me Philippe Caetano, ancien avocat d’Alain Bodchon, cette pétition risque d’être « contre-productive, car c’est à la justice et à elle seule de se prononcer […], même si on peut entendre la colère des victimes ».
Une démarche « de droit »
Le juriste insiste également sur le cadre légal dans lequel se situe la demande d’Alain Bodchon : « On ne peut pas lui en faire le procès, car, entre sa détention préventive et sa peine purgée dans le Nord, il est actuellement à mi-peine et donc dans son droit pour solliciter une mise en liberté conditionnelle. D’autant qu’aucune peine de sûreté n’a été prononcée en 2007. »
Et de conclure : « Si elle est accordée, une libération conditionnelle s’accompagne d’un suivi judiciaire. Les détenus qui en bénéficient ne sont pas lâchés dans la nature. Ce qui offre de meilleures conditions de réinsertion, d’une part, et évite les risques de récidive, d’autre part. Même si les experts avaient évacué tout risque concernant mon client lors du procès. »
Julien Bachellerie
RAPPEL DES FAITS
Le tueur à gages chassait pour le «seigneur» de Corrèze
Aux assises de Tulle, vingt-deux ans de prison pour un crime commandité.
Tulle envoyé spécial
C’est un procès où il manque quelqu’un. Il est pourtant sans arrêt question de lui. Son nom fait frémir le public de la cour d’assises de Tulle. Un témoin hésite même à le prononcer. L’avocat général dit qu’il est la clé de tout. Le psychiatre aurait bien aimé le voir pour comprendre davantage. Cet absent, c’est Roland Bondonny. A Tulle, il aurait dû être là, mis en examen pour «complicité d’assassinat». Son nom est d’ailleurs écrit sur l’ordonnance de renvoi de ce procès. Mais il ne viendra pas. Il s’est pendu dans sa cellule de la maison d’arrêt de Tulle, en février 2005.
Bondonny était alors en prison pour avoir commandité un crime. Son homme de main s’appelle Alain Bodchon, 54 ans, qui a été condamné mardi soir à vingt-deux ans de réclusion criminelle pour l’assassinat de Marius Lac, gendarme à la retraite, en août 2004. Bodchon avait tué Lac parce que ce dernier avait témoigné contre Bondonny dans un autre procès (lire encadré). Ce tueur à gages occasionnel est un petit bonhomme vêtu d’un blouson de jean, le nez taillé à la serpe et le crâne dégarni, il a la carrure et la corpulence de l’ex-boxeur amateur qu’il a été.
«Besnard». L’histoire prend ses racines en Corrèze, où les forêts sont grandes et où les gens aiment chasser. Bondonny est chasseur et sait combien les chiens sont précieux. Pourtant, il est soupçonné d’en avoir envoyé 140 au tapis, entre 1998 et 2001. Sa méthode ? Des boulettes de viande mélangées à du carbofuran, un herbicide. Un avocat l’a qualifié de «Marie Besnard» des toutous de Corrèze.
Bondonny, c’est quelqu’un, dans le coin. Il a plus de 900 hectares de terres. Il n’aime pas trop qu’on chasse à proximité de chez lui. Il fait peur à tout le monde.
L’absence de Roland Bondonny s’est fait sentir. Celle de Marius Lac, la victime de ce procès, aussi. La dernière fois qu’on a croisé Marius, c’était justement au procès de Bondonny, en septembre 2003.
«Serfs». Cet ex-gendarme, également chasseur, témoignait contre Bondonny. Marius avait averti l’assistance. «Venir ici [au tribunal, ndlr], c’est un acte de bravoure. Moi, quand je le rencontre, Bondonny, c’est dans un maquis et il a une arme.» Il avait parlé des menaces de Bondonny de lui «casser les dents». Et il avait conclu : «Il jouait au seigneur et on était les serfs.»
Concernant les menaces, Lac avait vu un peu juste. Le jour de sa mort, le 24 août 2004, il prend des coups de poing à la tête, la tête cognée contre le sol. Le coup de grâce vient d’un merlin, cet objet servant à fendre le bois. Bodchon n’y est pas allé de main morte. «Il a littéralement éclaté le crâne», dit le médecin légiste. Avant de mourir, la victime a presque reconnu la signature de son meurtrier. «Fumier, tu viens du Nord», a-t-il lancé à Bodchon.
C’est à Fourmies, où il se rendait souvent pour vendre son vin, que Bondonny a rencontré son homme de main. Bondonny a la rancune solide. Après le premier procès, il décide d’utiliser Bodchon pour se venger de Marius Lac. Bodchon est un gars du Nord, pas très futé, qui n’a pas confiance en lui. Il s’est essayé comme maçon mais ne s’est pas distingué pour son sens des affaires, a déposé deux fois le bilan. Il a une dette de près de 2 millions de francs de l’époque. En février 2003, il a essayé de s’immoler au white spirit. Bondonny le croise au bar Le Monroe. Il copine avec lui, l’invite au restaurant, flambe devant lui. Sa Mercedes, ses terres en Corrèze, le beau monde qui vient y chasser. Bodchon l’admire, il est fier d’avoir un ami comme lui. Bondonny lui confie ses ennuis corréziens, de chasse, de territoires, de chiens. Lui demande de l’aider. «Je l’aimais plus qu’il ne m’aimait», dira Bodchon.
«Trouille». Bodchon veut lui rendre service. Un soir, Bondonny lui demande s’il serait capable de tuer quelqu’un. Le gendarme Lac ? «Bondonny m’avait dit que c’était une saloperie», dit Bodchon. Que dans la bande de ceux qui lui en voulaient, pour l’affaire des chiens, c’était lui «le meneur». Dans un carnet retrouvé chez Bodchon, il y avait une autre liste de noms de gens à qui il fallait faire peur à cause de leur témoignage contre Bondonny. Durant tout le procès, Bodchon insiste : il n’y est pas allé pour tuer, juste pour «foutre la trouille». D’ailleurs, il n’a même pas touché un sou.
Les gendarmes, qui se doutaient de quelque chose, ont mis le duo sur écoute, l’ont arrêté. Bondonny, interrogé, a nié, lâché son homme de main. Bodchon, qui croyait que c’était un ami, en a conçu de l’amertume. Il n’a plus que ses yeux pour pleurer.
10 août 2009
L’affaire Roland Bondonny
Marius Lac est un gendarme à la retraite qui vit seul à la Chapelle-Spinasse (Corrèze). Ce 25 août 2004, sa famille s’inquiète de ne pas avoir de nouvelles de lui depuis plusieurs jours. Comme il ne reçoit pas de réponses aux multiples coups de fil qu’il tente de passer à son cousin, Fernand Gourinel décide finalement de se rendre à son domicile pour tenter de savoir ce qu’il lui est arrivé.
Arrivé sur les lieux, il remarque une tâche de sang à l’entrée de la réserve de bois. Il ne lui faut pas beaucoup de temps pour comprendre que quelque chose de grave est arrivé et en s’approchant ses craintes sont confirmées lorsqu’il découvre le corps de Marius Lac dissimulé sous une brouette. En état de choc, Fernand Gourinel alerte les gendarmes qui arrivent peu après sur les lieux.
Dès les premières constatations, les enquêteurs sont persuadés du caractère criminel de cette affaire. Des traces de luttes sont identifiées à proximité du corps qui présentent de nombreuses plaies sur le crâne, comme si l’agresseur s’était acharné sur lui. En revanche, la maison de la victime n’a vraisemblablement pas été cambriolée.
Le juge Pierre Baron, en charge de l’instruction, privilégie dès le début des investigations quatre axes de recherches:
– Le crime d’un rôdeur même si le mobile du vol n’est pas établi.
– Une affaire passionnelle car Marius Lac était divorcé.
– Une éventuelle vengeance liée à sa carrière passée de gendarme.
– La piste d’un lien avec une affaire d’empoisonnement de chiens qui traumatise la région depuis plusieurs années et dans laquelle Marius Lac était un témoin important.
Ces empoisonnements en série ont débuté six ans plus tôt, le 30 août 1998 très exactement. C’est à cette date que les gendarmes reçoivent en seulement trois heures, sept plaintes d’habitants de la région d’Egletons (Corrèze). Tous viennent raconter la même histoire: Ils ont retrouvé leur chien mort, vraisemblablement empoisonné.
Quelques jours plus tard, des chiens appartenant à un groupe de chasseurs meurent dans d’atroces souffrances quelques minutes après avoir ingéré des boulettes de viande hachée de couleur bleue disséminées en pleine campagne. L’analyse de ces boulettes permet d’identifier la substance mortelle. Il s’agit de carbofuran, un puissant insecticide utilisé à l’époque en agriculture et interdit depuis en raison de sa grande toxicité. La forte concentration du produit (5%) laisse à penser qu’il s’agit d’un insecticide utilisé par un professionnel.
Dans les semaines qui suivent, d’autres boulettes apparaissent dans les communes alentours comme à Rosiers d’Egletons, Moustier-Ventadour, Darnets, La Chapelle-Spinasse et Saint-Hilaire-Foissac. A chaque fois, le poison est déposé la nuit, les veilles de week-end, dans des zones habituellement fréquentées par les chasseurs. Le parallèle est très vite établi par la population: Compte tenu de sa parfaite connaissance des lieux, l’empoisonneur pourrait bien être un chasseur lui-même. Son mobile serait alors de se débarrasser des chiens de ses « concurrents ».
Un nom vient souvent à la bouche des habitants de la région, celui de Roland Bondonny. Ce notable est jalousé car il s’est constitué une zone de chasse privée très étendue fréquentée par seulement une dizaine de chasseurs. En plus, ce territoire est mystérieusement épargné par les empoisonnements.
Roland Bondonny, homme colérique et autoritaire, est en conflit depuis des mois avec des chasseurs pour des questions de limite de propriété. C’est à la suite d’une énième dispute qu’il aurait déclaré à son interlocuteur: « Tu veux me pourrir ma chasse, je te pourrirai la tienne ». Et effectivement, depuis cette altercation, les boulettes bleues sont apparues un peu partout dans la région.
De son côté, Marius Lac, gendarme en retraite au courant de ces rivalités, invite ses collègues d’Egletons à enquêter du côté de la chasse privée de Roland Bondonny.Mais son témoignage restera sans suite.
A la fin de la saison de chasse en février 1999, le bilan est lourd: 30 chiens, des chats et un mouton sont morts après avoir mangé des boulettes.
Sept mois après le début de l’affaire, les autorités décident de mettre les moyens pour tenter de résoudre l’énigme. 13 gendarmes sont ainsi employés à plein temps dans ce dossier. Cette décision est loin d’être superflue car après trois mois de calme, l’empoisonneur reprend de plus belle ses funestes activités. Désormais, onze communes sont touchées, y compris, et c’est plus grave, en plein centre des villages. Des boulettes sont même retrouvées dans des cours d’école. La psychose s’installe en Corrèze. Des surveillances sont organisées par la population mais aucun témoin ne se manifeste auprès des forces de l’ordre.
L’enquête n’avance pas et durant près d’un an en 2000, les boulettes disparaissent aussi mystérieusement qu’elles étaient apparues. Alors que la peur commençait à retomber, l’empoisonneur dépose de nouvelles boulettes en février 2001 à Darnets et Moustier-Ventadour. Mais cette fois, les gendarmes ont une piste. Une Renault Express blanche est aperçue par quatre témoins. Son conducteur est passé à plusieurs reprises devant leur maison. Le lendemain, des boulettes sont retrouvées à l’endroit exact où la voiture avait fait demi-tour.
Les témoins sont précis puisqu’ils indiquent aux gendarmes que la plaque d’immatriculation de la Renault se termine par « RM 19 ». Parmi les 14 véhicules identifiés, figure celui de Roland Bondonny, accusé par la rumeur depuis le début de l’affaire.
Avant même que les enquêteurs ne le convoquent, Roland Bondonny se présente spontanément à la gendarmerie. Il souhaite porter plainte car sa chienne a, elle aussi, été victime de l’empoisonneur. Les gendarmes en profitent pour lui poser des questions sur son emploi du temps trois jours auparavant. Il répond être resté chez lui à regarder un match de football, or, après vérifications, il est établi qu’aucun match n’était diffusé ce jour-là à la télévision. Des questions lui sont alors posées sur les circonstances de la mort de sa chienne. Roland Bondonny explique l’avoir installée à l’arrière de sa Renault Express dont une grille métallique sépare les deux places avant de la zone de chargement pour l’emmener chez le vétérinaire. Pressé de questions, Bondonny s’énerve et refuse que l’on fouille son véhicule. C’est alors que les gendarmes le laissent partir en prenant la précaution de le suivre à distance.
Arrivés à son pavillon de chasse, les gendarmes interviennent et procèdent à la perquisition du véhicule. En neuf endroits, tous situés à l’avant de la Renault, les techniciens retrouvent du carbofuran pur concentré à 5 %, comme dans les boulettes de viande.
Or, Roland Bondonny avait expliqué que sa chienne empoisonnée se trouvait à l’arrière de la fourgonnette. Se rendant compte de l’incohérence de ses explications, il tente maladroitement de changer de version en racontant que finalement sa chienne était sur le siège avant. Mais les gendarmes ne le croient pas, pas plus qu’il ne croient ses dires lorsqu’il affirme que sa chienne a vomi dans la voiture ce qui pourrait expliquer les différentes zones de découverte du poison. Mais en l’absence de viande dans les prélèvements, sa version ne tient pas.
Logiquement, Roland Bondonny est mis en examen pour acte de cruauté envers les animaux le 14 février 2001.
Le 24 juin 2003, après plus de deux ans d’instruction, s’ouvre devant le tribunal correctionnel de Tulle le procès de l’empoisonnement des animaux. Avec pas moins de 80 parties civiles pour 144 animaux domestiques tués, le procès est retransmis sur écrans géants dans trois salles du palais.
Mais dès le premier jour de l’audience, à 8 h 45, l’avocat de Roland Bondonny annonce que son client vient d’être renversé par une camionnette sur le parking de son hôtel et qu’il est blessé. Dans le tribunal c’est à la fois la stupéfaction et l’incrédulité. Après avoir mandaté un expert médical, le président du tribunal prend la décision de renvoyer le procès.
L’audience suivante s’ouvre donc quatre mois plus tard, le 1er octobre 2003. Et cette fois Roland Bondonny est présent. Il arrive quasi-triomphant au volant de sa grosse berline allemande protégé par un cordon de policiers. L’homme intimide dans la région et peu nombreux sont les témoins qui acceptent de déposer à la barre. Seuls Eric Fournial, un chasseur en conflit avec le prévenu et Marius Lac osent s’exprimer. Ce dernier explique notamment avoir été menacé de mort par le négociant en vins et qu’il lui a fallu bien du courage pour venir aujourd’hui au tribunal.
Lorsque le débat s’oriente sur les questions techniques et notamment sur la présence de poison à l’avant de son véhicule, Bondonny s’embrouille dans ses explications. Pour couronner le tout, son propre fils vient témoigner et raconte avoir lui-même ouvert les portes arrières de la Renault pour faire monter la chienne malade. Ceci en totale contradiction avec la seconde version donnée par son père selon laquelle la chienne était à l’avant.
A la fin des débats, le Procureur demande le maximum, soit deux ans d’emprisonnement. Reconnu coupable par le tribunal, Roland Bondonny est finalement condamné à deux ans de prison dont un avec sursis et à 111613 euros de dommages et intérêts pour les victimes. Comme la loi le lui autorise, il décide de faire appel. Son procès est prévu pour le mois d’octobre 2004.
Et c’est à moins de deux mois de l’ouverture du procès que Marius Lac est retrouvé mort assassiné. Sur la scène de crime, les gendarmes découvrent un indice intéressant. Il s’agit d’un bout de papier à moitié calciné sur lequel sont notés des noms de ville allant de la région parisienne jusqu’à la Corrèze.
Au dos du document est écrit le numéro de téléphone de Marius Lac. Ces éléments laissent à penser que le meurtrier n’est visiblement pas de la région et s’est préparé cet itinéraire pour se rendre en Corrèze. Un autre élément vient confirmer l’intuition d’un crime perpétré par un « étranger ». Le jour du drame, une Alfa Romeo rouge immatriculée en 02 a été aperçue par plusieurs habitants de la Chapelle-Spinasse, dont la victime elle-même qui l’a raconté à sa fille au téléphone quelques heures avant sa mort. Enfin, un étrange cycliste chaudement vêtu malgré la période estivale, n’a pas manqué de se faire remarquer sur son vélo vert ce 24 août. D’autant plus que selon certains témoins il leur aurait demandé de lui indiquer la résidence de Marius Lac.
Un dernier témoignage intéresse également les enquêteurs. Celui d’une employée de péage qui affirme avoir été troublée par un usager de l’autoroute le 24 août vers 22 heures lorsqu’elle s’est aperçue que ses mains et son visage étaient couverts de sang.
Dans cette affaire de meurtre tout s’accélère le 6 septembre 2004. Ayant placé Roland Bondonny sur écoute, les enquêteurs tombent sur une conversation téléphonique particulièrement intéressante. Bondonny et son interlocuteur semblent méfiants et utilisent des codes pour se fixer d’autres rendez-vous téléphoniques. L’appel vient de la commune de Fourmies (Nord), où réside la plupart du temps Roland Bondonny pour ses affaires de négoce en vins de Bordeaux. II s’agit du numéro d’un bar dont le gérant s’appelle Alain Bodchon.
Parallèlement, l’analyse croisée du fichier des cartes grises et des relevés téléphoniques permet d’identifier un homme, propriétaire d’une Alfa Romeo rouge immatriculée dans l’Aisne, ayant eu des contacts téléphoniques avec Roland Bondonny. Interrogé par la police, l’homme reconnait posséder la voiture mais explique qu’il ne l’utilise jamais mais la prête à un ami dénommé Alain Bodchon. En recherchant les relais téléphoniques activés par le téléphone portable d’Alain Bodchon le 24 août, les gendarmes retracent très exactement le parcours tracé sur la feuille de papier retrouvée sur la scène de crime.
Le 13 octobre 2004, l’affaire des chiens empoisonnées revient sur le devant de la scène médiatique avec l’ouverture du procès en appel. Mais une nouvelle fois l’audience est reportée car le président du tribunal est souffrant.
Surveillés depuis plusieurs semaines dans l’espoir de prendre les deux hommes en plein échange d’argent, Roland Bondonny et Alain Bodchon sont finalement interpellés simultanément le 19 octobre 2004.
Si Roland Bondonny se borne à déclarer qu’il a rien à voir dans cette histoire, Alain Bodchon décide de tout avouer. Oui c’est lui qui a tué Marius Lac pour le compte de son ami Roland Bondonny. Il explique que cela faisait des mois que Bondonny le harcelait pour qu’il se rende en Corrèze corriger ce Marius Lac qui serait l’instigateur de toutes ces accusations d’empoisonnement. Bodchon est influençable et cède en décembre 2003. A cette date il descend en Corrèze mais ne trouve pas l’ancien gendarme. C’est alors que Roland Bondonny poursuit son harcèlement jusqu’à ce qu’Alain Bodchon accepte d’y retourner une seconde fois en août 2004 avec une grosse somme d’argent à la clé.
Les éléments recueillis par les gendarmes sont alors suffisamment probants pour que le juge d’instruction mette les deux hommes en examen le 21 octobre 2004. Placés en détention provisoire ils sont extraits de leurs cellules le 13 décembre 2004 pour la reconstitution du meurtre à la Chapelle-Spinasse.
Alain Bodchon coopère avec les enquêteurs. D’après ses déclarations, il aurait interpellé Marius Lac en prétextant vouloir acheter son 4X4. Puis, après être entré dans la maison pour consulter les papiers du véhicule, il aurait profité que Marius Lac lui tourne le dos en retournant au garage pour le frapper. S’en serait suivie une lutte entre les deux hommes durant laquelle Marius Lac, comprenant l’origine de cette agression, lui aurait lancé « Espèce de fumier, tu viens du Nord ». C’est alors que Marius Lac se serait emparé d’une hache et aurait frappé son agresseur à la main (d’où le témoignage de l’employé de péage) avant de perdre son arme au profit de Bodchon. Se sentant démasqué, ce dernier lui aurait alors porté le coup de grâce à la tête.
Depuis sa prison de Tulle, Roland Bondonny prépare sa défense. Selon lui, Alain Bodchon aurait agi de sa propre initiative. Criblé de dettes et connaissant parfaitement l’affaire des chiens empoisonnés, il serait allé éliminer ce témoin gênant pour Bondonny dans le but de lui soutirer de l’argent ensuite pour « service rendu ». Bien entendu, les avocats de la famille de la victime ne croient pas une seconde à cette thèse pour le moins fantaisiste.
Dans le dossier des chiens empoisonnés, un nouveau témoignage vient l’enfoncer un peu plus dans cette affaire. Le 21 octobre 2004, alors que Roland Bondonny est incarcéré depuis 48 heures, un fax arrive à la mairie de la Chapelle-Spinasse. Le document est signé de la main de Bernard Nival, un grossiste en insecticides installé dans le Nord. C’est en ayant lu un article dans le journal parlant des deux affaires impliquant Roland Bondonny qu’il l’aurait reconnu. C’est chez lui qu’il se serait approvisionné en carbofuran à plusieurs reprises entre 1997 et 2001.
C’est avec ce nouvel élément dans le dossier que le procès en appel des empoisonnements s’ouvre le 2 février 2005 à Limoges (Haute-Vienne). Bien que non concernées par cette affaire, les filles de Marius Lac sont présentes au tribunal pour apercevoir celui qui pourrait avoir commandité le meurtre de leur père.
Mais comme en première instance, l’accusé n’est pas présent à l’ouverture de l’audience. Les minutes s’écoulent jusqu’à ce que la nouvelle tombe: Roland Bondonny s’est donné la mort par pendaison dans sa cellule. Son corps a été retrouvé par ses gardiens vers 6 heures du matin alors qu’ils venaient le réveiller. Avant de se suicider, Bondonny a laissé une lettre à son avocat dans laquelle il explique être accusé à tord mais préfère en finir car il n’a pas confiance en la justice.
Bien entendu cette annonce fait l’effet d’une bombe au palais de justice. Le geste de Roland Bondonny est interprété par les victimes comme un acte de lâcheté et un aveu de culpabilité.
Bondonny mort, l’affaire des chiens empoisonnés ne sera jamais jugée. En revanche, le procès d’Alain Bodchon s’ouvre devant la cour d’assises de Tulle en mai 2007.
Comme on pouvait s’y attendre, l’ombre de Roland Bondonny plane durant toute la durée des débats. Alain Bodchon tente de minimiser son geste en déclarant qu’il n’avait pas l’intention de tuer Marius Lac mais seulement de lui faire peur. Pour autant les jurés retiennent la préméditation et condamnent le gérant de bar à 22 ans de réclusion criminelle le 15 mai 2007. Quant à Roland Bondonny, il restera à jamais présumé innocent dans ces deux dossiers.