Alors que le ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve, a décidé de suspendre l’utilisation des grenades offensives après la mort d’un manifestant dimanche à Sivens (Tarn), les syndicats de police dénoncent une décision «hâtive» et «politique».
L’annonce de Bernard Cazeneuve de suspendre l’utilisation des grenades offensives ou GLI (grenade lacrymogène instantanée) par les gendarmes et par les CRS, après la mort d’un manifestant dimanche au barrage de Sivens (Tarn), crée des remous dans les syndicats policiers. Pour Patrice Ribeiro, le secrétaire général de Synergie-Officiers, la décision du ministre de l’Intérieur est «avant tout politique». «Il n’y a pas de justificatif opérationnel technique puisqu’on ne sait pas ce qu’il s’est passé. Certes, on a retrouvé des traces de TNT sur les vêtements de la victime, mais on ignore si c’est une grenade de la gendarmerie qui est en cause», explique auFigaro le responsable syndical. Alors que l’enquête judiciaire semble privilégier pour l’instant la thèse d’un décès dû à une grenade offensive lancée par les gendarmes, les résultats de l’inspection, demandée à l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) et l’Inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN), ne devraient être connus que d’ici quinze jours.
En attendant, l’inquiétude monte parmi les syndicats, qui rappellent que l’usage de ce type de munitions est très réglementé et qu’il n’a jamais posé problème jusque-là. «On ne les utilise pas n’importe comment, assure Patrice Ribeiro. Il y a une gradation dans l’usage des armes». «Dans le cas présent, leur utilisation était justifiée par les gens très durs qu’ont dû affronter les gendarmes. C’était des militants préparés et équipés de matériel sophistiqué comme des fusées ou des bouteilles d’acide», poursuit le syndicaliste.
Une «décision hâtive»
Éric Mildenberger, délégué général CRS du syndicat Alliance , va dans le même sens, en évoquant une utilisation des grenades GLI «dans des situations de violence extrême» et «quand les gaz lacrymogènes deviennent insuffisants». Ces armes non létales présentent un double avantage pour les policiers et les gendarmes: assurer le maintien de l’ordre et limiter le nombre de blessés, en maintenant à distance les manifestants et policiers. «Si on nous retire ces grenades, on a quoi après? Les armes létales?», s’inquiète auprès du Figaro Éric Mildenberger, qui critique une «décision hâtive».
«Cette mesure ne peut être que temporaire. Si ce n’est pas le cas, ça sera problématique», tempête à son tour le secrétaire général de l’Unsa Police, Philippe Capon, qui a déjà fait part de sa colère au ministère de l’Intérieur. «On nous a dit que la décision était prise pour quinze jours, on en prend bonne note, mais on est inquiets sur la manière dont vont se dérouler les prochains maintiens de l’ordre», insiste le responsable, craignant des blessés chez les CRS alors qu’une «grosse manifestation» est annoncée ce week end à Nantes.
Pour Synergie-Officiers aussi, il est urgent que les forces de l’ordre puissent à nouveau utiliser ces grenades. «Si les militants les plus durs savent qu’on en est privés, la violence augmentera», prédit son secrétaire général, Patrice Ribeiro. Avant de conclure: «Les politiques n’assumeront de toute façon pas que notre intégrité physique et celle de nos collègues gendarmes soit mise en danger».