Mort de Rémi Fraisse : l’avocat de la famille met en cause les gendarmes
Publié le 28.10.2014, 09h15 | Mise à jour : 10h06
ALBI (TARN), LE 27 OCTOBRE. Les forces de l’ordre face aux manifestants lors d’un rassemblement en mémoire de Rémi Fraisse. L’avocat de la famille a dit mardi privilégier la thèse d’un «tir d’arme» par les gendarmes pour expliquer la mort de Rémi. | AFP/REMY GABALDA
Alors que les résultats de l’autopsie de Rémi Fraisse, mort dimanche sur le site du barrage contesté de Sivens (Tarn), laissent planer le doute, et que les parents du jeune militant écologiste s’apprêtent à porter plainte, l’avocat de la familleprivilégie la thèse d’un «tir d’arme» par les gendarmes pour expliquer la mort du jeune homme.
SUR LE MÊME SUJET
- Militant mort à Sivens : sa famille va porter plainte pour «homicide volontaire»
- Barrage de Sivens : violents affrontements lundi soir à Nantes et Albi
- Mort à Sivens : une «tache» sur «l’action du gouvernement», dénonce Duflot
- ABONNES – Un amoureux de la nature décrit comme non violent
- ABONNES – Une explosion a tué le manifestant antibarrage
- Mort à Sivens : Hollande et Valls, entre «compassion» et «vérité»
- VIDEOS. Mort à Sivens : l’enquête met en cause les gendarmes
«Je m’oriente plutôt vers un tir d’arme, un projectile, flash-ball, grenade, à tir tendu, assez proche, pendant une charge des gendarmes mobiles», a déclaré Me Arié Alimi ce mardi matin sur France Info, confirmant qu’il déposerait plainte pour «homicide volontaire» ce mardi matin.
«Moi, c’est ce à quoi les résultats de l’autopsie me font penser au jour d’aujourd’hui. Maintenant, c’est peut-être tout à fait autre chose. C’est le juge d’instruction qui le déterminera», a-t-il ajouté. Justifiant que la plainte ait été déposée pour homicide «volontaire» et non «involontaire», l’avocat a expliqué que les gendarmes sont «des militaires aguerris et savent que, dans certaines conditions, des projectiles tirés peuvent provoquer la mort». «Des militaires savent parfaitement que cela peut provoquer la mort, il peut y avoir une intention de la donner», a-t-il asséné.
«Affligeant qu’une information judiciaire n’ait pas été ouverte»
Le ministère public «essaie de semer un petit peu la confusion et de dire que le décès de Rémi peut être causé par un cocktail Molotov lancé par les manifestants», lors des affrontements avec les forces de l’ordre sur le site du barrage dans la nuit de samedi à dimanche. «Ce que je sais, c’est qu’il n’y a pas de brûlures. Un cocktail Molotov provoque des brûlures, donc moi, je fais un postulat de départ, je m’oriente plutôt vers un tir d’arme».
AUDIO. L’avocat de a famille Fraisse livre son hypothèse sur le déroulement du drame
L’avocat a jugé «affligeant» que le procureur de la République à Albi, Claude Dérens, n’ait pas ouvert une information judiciaire, ce qui aurait pu «remettre cette enquête dans les mains d’un juge d’instruction indépendant».
Dans une conférence de presse donnée lundi à Albi, le procureur a indiqué que les résultats de l’autopsie sur le corps de Rémi avaient montré que sa «plaie importante située en haut du dos a été causée, selon toute vraisemblance, par une explosion». «Mais le légiste ne peut ni affirmer ni infirmer que l’origine de la plaie proviendrait d’une grenade lancée depuis la zone où les gendarmes étaient retranchés», avait-t-il ajouté.
Lundi, une dizaine de manifestations en mémoire de Rémi Fraisse se sont tenues en France,dont certaines ont dégénéré. tandis que la mort du jeune homme a entraîné de nombreuses réactions politiques, allant jusqu’à la passe d’arme entre le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve et le député européen José Bové.
VIDEO. Mort de Rémi au barrage de Sivens : « J’avais dit à mon fils d’être très prudent »
VIDEO.Sivens: Cazeneuve demande aux porteurs de la parole publique d’être « responsables »
VIDEO. Bové, sur la mort de Rémi: « Le ministre de l’Intérieur a la responsabilité de cette situation »
VIDEO. Albi : le rassemblement en mémoire de Rémi dégénère
VIDEO. Barrage contesté du Tarn : violences pendant la manifestation à Nantes
LeParisien.fr
ENQUETE Des zones d’ombre entourent encore le décès de l’opposant au barrage tarnais…
Barrage de Sivens: Ce que l’on sait des circonstances de la mort de Rémi Fraisse
Le militant anti-barrage de Sivens (Tarn) dont le corps a été retrouvé dans la nuit de samedi à dimanche sur le site a-t-il été tué par les gendarmes? Les causes exactes du décès de Rémi Fraisse, 21 ans, sont encore indéterminées, selon le procureur d’Albi. L’autopsie est prévue ce lundi.
Dans quel contexte a-t-il été retrouvé?
Alors qu’un rassemblement avait réuni environ 2.000 manifestants samedi après-midi sur le site du barrage controversé de Sivens, «une centaine d’opposants violents a voulu en découdre avec les forces de l’ordre», a indiqué le procureur de la république Claude Dérens. Les forces de l’ordre, qui avaient pour mission de protéger l’aire de stockage des engins de chantier, «ont été attaquées en règle par le groupe de manifestants violents, approximativement une centaine, qui jetaient des cocktails Molotov, des engins pyrotechniques et des pierres sur le grillage et à l’intérieur, depuis l’extérieur», a rapporté le procureur.
Comment le corps de Rémi a été récupéré?
Les gendarmes, au nombre de 70, poursuit le procureur, ont «balayé par des torches [le terrain], ce qui a permis de repérer le corps d’un homme gisant au sol». Les forces de l’ordre ont alors chargé les manifestants pour «rapatrier le corps», avant «de lui donner les premiers secours». Ce lundi matin, des traces de sang en deux lignes parallèles, faisant penser à celles laissées par deux pieds traînant sur le sol, étaient toujours visibles à l’endroit où a été extrait le corps de Rémi. Les forces de l’ordre n’ont pas pu faire de relevés de la situation en raison de la poursuite des affrontements.
Quelle est la version des manifestants?
La description de ces événements n’est pas en contradiction avec la version de Ben Lefetey, porte-parole du collectif Sauvegarde de la zone humide du Testet, qui regroupe la majeure partie des opposants au projet de barrage. «Nous ne disons pas que les forces de l’ordre ont tué un opposant, mais un témoin nous a dit que le décès s’était passé au moment d’affrontements. Un témoin dit avoir vu quelqu’un s’effondrer lors d’affrontements et être enlevé par les forces de l’ordre», a-t-il ajouté.
Rémi a-t-il été touché par une grenade?
C’est ce qu’une journaliste de Reporterre écrit sur la foi de témoignages de manifestants ayant participé aux événements dans la nuit de samedi à dimanche. Ainsi, l’un d’entre eux, Camille, raconte: «Il était à trente mètres de moi sur ma gauche. Je l’ai vu se faire toucher alors qu’il y avait des explosions à côté. Ils ont envoyé des grenades explosives, des tirs de flash-ball. Après, cette personne s’est retrouvée à terre. Il y a eu une charge de flics, j’ai chargé aussi, mais je me suis retrouvé tout seul, du côté gauche. Mais tout le monde est arrivé trop tard, ils ont mis en joue ceux et celles qui arrivaient. J’ai vu ce gars à terre se faire traîner par les policiers et on n’a pas pu en savoir plus.»
Ce type de grenades, lacrymogènes ou assourdissantes, utilisées par les forces de l’ordre lors d’opérations de maintien de l’ordre est présenté comme non létal. Le directeur général de la gendarmerie nationale (DGGN) a indiqué dans un communiqué de presse qu’il considérait «que les militaires de la gendarmerie ne sauraient être mis en cause sur la seule base de témoignages, parfois anonymes, présentés par certains médias.»
Rémi avait-il bu?
Selon Victor Belle, un militant cité par l’AFP qui a vu le corps inanimé du jeune homme être ramassé par les gendarmes, Rémi était «lucide». «Il n’était pas bourré, il n’était pas défoncé», assure-t-il. L’autopsie du jeune homme doit être réalisée ce lundi après-midi. Les premiers résultats toxicologiques devraient apporter des précisions sur cette question.
Barrage de Sivens : Cazeneuve condamne les incidents, appelle à la retenue
Par 20minutes.fr 20minutes.fr/20minutes.fr – Le ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve, le 28 septembre 2014 à Paris, Thomas Samson AFP
Le ministre de l’Intérieur a condamné les incidents qui se sont déroulés dimanche soir à Gaillac, près du site du barrage contesté de Sivens, et a appelé «à la retenue les responsables politiques et associatifs», qui se sont exprimés sur la mort d’un jeune homme la veille.
Après la découverte du corps d’un jeune homme de 21 ans, Rémi, décédé dans la nuit de samedi à dimanche sur le site du barrage, Bernard Cazeneuve a appelé à la retenue» dans un communiqué «les responsables politiques et associatifs qui se sont autorisés à tenir des propos approximatifs, irresponsables et polémiques».
Contexte d’affrontements avec les gendarmes
Les causes exactes du décès du jeune homme sont encore indéterminées, a expliqué à la presse le procureur d’Albi Claude Dérens, qui attend les premiers résultats de l’autopsie prévue lundi.
Un porte-parole des opposants au barrage, Ben Lefetey, avait affirmé plus tôt que la mort du jeune homme a «eu lieu dans le contexte d’affrontements avec les gendarmes», sans affirmer que «les forces de l’ordre ont tué un opposant».
Bové contre Cazeneuve
Le député européen écologiste José Bové avait de son côté dénoncé des «violences policières importantes» au fil des dernières semaines contre les opposants au projet de barrage.
«Ces commentaires ne participent ni à la manifestation de la vérité, ni au nécessaire retour au calme», a estimé Bernard Cazeneuve. Le ministre a également condamné «avec la plus grande fermeté les incidents qui se sont déroulés dans la soirée à Gaillac» (Tarn).
Rien ne peut jusifier «ce déchaînement de violences répétées»
Selon lui, dimanche soir, «plusieurs centaines de personnes se sont rassemblées, parmi lesquelles des individus très violents, certains cagoulés, qui ont commis des dégradations dans la ville, porté atteinte au Monument aux Morts et brûlé des drapeaux tricolores».